Étiquette : folie

« Quichotte » de Gwenaël Morin dans le Jardin de la rue de Mons – de l’importance de croire

Depuis Le Songe l’an dernier, rendez-vous est pris dans le Jardin de la rue de Mons avec Gwenaël Morin, invité pendant quatre ans à créer un spectacle en rapport avec la langue du Festival d’Avignon invitée. Cette année, le metteur en scène choisit un monument, si ce n’est le monument de la littérature de langue espagnole : Don Quichotte de Cervantès. Une de ces œuvres que tout le monde connaît sans même l’avoir lue, dont les personnages sont familiers, dont certaines scènes sont inlassablement reprises, mais que finalement très peu de monde a effectivement lue in extenso. Le projet de Morin promet ainsi la rencontre, ou au moins une rencontre avec cette œuvre. Pour s’en emparer, le metteur en scène réunit une équipe qui n’est pas historiquement la sienne, celle du Théâtre Permanent, comme l’an dernier. Il prend le parti de la célébrité et engage une tête d’affiche : Jeanne Balibar. Et une autre tête d’affiche, plus discrète mais tout aussi grande pour les gens de théâtre : Marie-Noëlle (ex Yves-Noël Genod). À leurs côtés, Thierry Dupont et Léo Martin, en alternance avec lui-même. Ils sont donc quatre pour ce roman de quelques mille pages qui fourmille de personnages, et cette disproportion paraît caractéristique de Morin. Cette œuvre, en ce lieu, avec ces artistes, retentissaient comme une promesse. Une promesse hélas non tenue, mal tenue, qui révèle l’importance de croire.
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« La Brande » d’Alice Vannier au Théâtre de la Cité internationale – immersion en névropathie

Cette semaine avait lieu la première parisienne d’un spectacle créé il y a plus d’un an au Point du jour à Lyon, La Brande, de la compagnie Courir à la Catastrophe, mis en scène par Alice Vannier. Après entre autres un spectacle inspiré par la pensée de Pierre Bourdieu en 2018, En réalités, la compagnie s’est cette fois intéressée à la clinique de La Borde, établissement ouvert dans le Loir-et-Cher en 1953 sous l’impulsion de Jean Oury, qui a permis le développement de la psychothérapie institutionnelle, et qui constitue aujourd’hui encore une référence dans le domaine. Des recherches sur l’histoire du lieu et deux semaines d’immersion de l’équipe artistique au moment de l’année où soignants et soignés donnent rendez-vous aux personnes extérieures à la clinique pour une journée de fête ponctuée par une représentation, ont donné naissance à ce spectacle.
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« Institut Ophélie » d’Olivier Saccomano et Nathalie Garraud au T2G – Ophélie, balle rebondissante dans le flipper de l’histoire

Nathalie Garraud et Olivier Saccomano, tous deux à la tête du Théâtre des 13 vents à Montpellier, présentent au T2G le deuxième volet d’un diptyque. Après Un Hamlet de moins, Institut Ophélie. Shakespeare apparaît comme un point d’entrée dans ces spectacles ; il est avant cela un point de départ pour Olivier Saccomano, auteur. Dans Institut Ophélie, le duo d’artistes joue avec les représentations que l’on a d’Ophélie, figure théâtrale devenue figure picturale, opératique ou encore cinématographique, et tisse à partir d’elle une réflexion sur les femmes, la place qu’elles occupent ou la place qu’on leur donne. La folie d’Ophélie, sa virginité et sa parole prophétique permettent ainsi de traverser tout le vingtième siècle et de rejoindre notre époque. Une traversée dans laquelle le discours est relégué à l’arrière-plan à la faveur d’associations libres, d’une réflexion vive et rebondissante. Cette relégation qui fait toute la poésie du spectacle prend appui sur le travail scénique de Nathalie Garraud, qui crée des visions d’une précision fascinantes et enrichit nos imaginaires de rythmes et de tableaux qui élargissent notre perception.
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« Le moine noir » de Kirill Serebrennikov dans la Cour d’honneur du Palais des Papes – le diamant noir de la folie

L’édition 2022 du Festival d’Avignon est inaugurée dans la Cour d’honneur du Palais des Papes avec Le Moine noir. Après Les Métamorphoses d’Ovide, un scénario de Lars von Trier, Les Idiots, et le roman inachevé de Gogol, Les Âmes mortes, le metteur en scène russe s’empare cette fois d’une nouvelle de Tchekhov. Son adaptation, construite comme un crescendo, mène du réalisme au mysticisme, suivant une montée en puissance d’autant plus impressionnante qu’elle est imprévisible.
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« Cataract Valley » de Marie Rémond aux Ateliers Berthier – « théâtre de la conscience et des voix intérieures »

Dans la mémoire d’un spectateur, certaines performances d’acteurs gardent un relief singulier malgré le temps qui passe. Elles s’y sont imprimées de manière durable, au point, qu’avec elles, on ne cherche jamais le nom qui d’ordinaire échappe, que l’on met un moment à retrouver, qu’on a sur le bout de la langue. Dans ces cas-là, le spectacle, et plus particulièrement le jeu d’un acteur, a acquis la force d’un souvenir intime, inoubliable, inépuisable presque. Tel était le cas de l’interprétation de Marie Rémond, lorsqu’elle jouait Yvonne, princesse de Bourgogne dans la mise en scène de Jacques Vincey. Son corps désarticulé, son immense fragilité soumise à une violence tout aussi grande, et en même temps la puissance de son idiotie qui trouble, désempare, et finit par exercer une violence comparable à ceux qui se confrontent à elle, étaient mémorables.
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« De Paris, un caballero » de José Antonio Alonso – éloge de la folie

Pour commencer l’année 2018, la maison éditoriale Tablas-Alarcos a programmé dans la salle Adolfo Llauradó la reprise d’un spectacle déjà ancien, créé en 2001 et qui depuis n’a cessé de tourner à Cuba et à l’étranger : De Paris, un caballero. Le spectacle est l’œuvre de José Antonio Alonso, comédien qui a longtemps fait partie d’une compagnie très respectée à Cuba, le Teatro Buendía, dirigé par Flora Lauten, et qui a créé à partir de cette œuvre sa propre compagnie, El Caballero. Ce seul en scène rend hommage à une figure devenue mythique à La Havane, le Chevalier de Paris, déjà honoré par une statue de bronze située sur la place San Francisco de Asís, dont la barbe polie indique la coutume selon laquelle lui toucher porte chance. Rendant chair au personnage, José Antonio Alonso relate l’histoire de cet homme hors du commun, dont le destin devient un moyen de parler de la Cuba d’aujourd’hui et des crises qu’elle traverse.
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« Macbeth » de Shakespeare au Théâtre du Soleil

A l’occasion des cinquante ans de la troupe qu’elle a fondée en 1964, Ariane Mnouchkine propose après plusieurs années de création une mise en scène de Macbeth. Ce choix d’une pièce de Shakespeare permet de ressaisir l’histoire du Théâtre du Soleil, ponctuée par plusieurs des œuvres de cet auteur, Le Songe d’une nuit d’été en 1968, puis Richard II, La Nuit des rois et Henry IV entre 1981 et 1984.…

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« Perturbation » de Krystian Lupa, d’après Thomas Bernhard à la Colline

Après L’Homme sans qualités de Robert Musil, Les Frères Karamazov de Fiodor Dostoïevski, Le Maître et Marguerite de Mikhaïl Boulgakov ou plus récemment L’Autre côté d’Alfred Kubin, Krystian Lupa s’attaque une nouvelle fois à un roman dans son dernier spectacle. Perturbation a pour matériau premier l’œuvre du même nom de l’Autrichien Thomas Bernhard.…

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