Catégorie : Festival d’Avignon 2022

« Leurs enfants après eux » d’Hugo Roux au Théâtre 11 – portrait vigoureux d’une jeunesse désenchantée

Le Théâtre 11 est de ces salles, comme le Train bleu ou la Manufacture, dont la programmation est à suivre de près dans le Off d’Avignon, car les artistes qui y sont programmées une année peuvent se retrouver dans le IN l’année suivante. À 22h15, en salle 2, Hugo Roux présente une adaptation de Leurs enfants après eux, roman de Nicolas Mathieu paru en 2018, récompensé par le prix Goncourt et plébiscité par de nombreux lycéens qui choisissent de présenter cette œuvre à l’oral du bac de français. L’adaptation, qui implique sept acteurs au plateau et une ample scénographie qui ne cesse de se métamorphoser, est ambitieuse. Après le roman, elle parvient ainsi à immerger dans les intrigues estivales d’une ville de province, pendant la dernière décennie du XXe siècle.
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« مِلْك MILK » de Bashar Murkus à L’Autre Scène du Grand Avignon – monument à la gloire des mères en temps de guerre

Après Le Musée l’année dernière, le metteur en scène palestinien Bashar Murkus a de nouveau été invité à Avignon avec مِلْك MILK, présenté à Vedène. Dans le programme du Festival, مِلْك MILK porte deux étiquettes : « spectacle » et « indiscipline ». La première permet de distinguer les spectacles des concerts, expositions et lectures que comprend également la programmation. La deuxième caractérise le spectacle par élimination : ce n’est ni du théâtre, ni de la danse, ni de la performance. Quoique le spectacle ne provoque pas un bouleversement total des cadres d’appréhension, que le travail de Castellucci nous y ait préparé de loin en loin, la classification paraît juste. مِلْك MILK s’apparente à une grande fresque plastique, un tableau mouvant sans paroles qui offre des images permettant de penser les deuils impossibles des mères et des enfants.
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« Sans tambour » de Samuel Achache au Cloître des Carmes – symphonie d’émotions hors des mots

Sept ans après Fugue au Cloître des Célestins, Samuel Achache est invité à investir un autre Cloître du Festival d’Avignon, celui des Carmes, avec sa nouvelle création, Sans tambour. Le public est nombreux, mondain, pressé de s’offrir un de ces objets incomparables dont l’artiste a le secret, objet composé de musique et d’humour, dont la clé dramaturgique nous reste secrète mais qui nous invite pour cette raison à un investissement subjectif conséquent. Avec ce spectacle, Achache fait du spectateur un être de pure émotion, bien en peine de rendre compte de tout ce qu’il a vu et entendu et de tout ce qui l’a traversé.
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« À ne pas rater » de Nicolas Heredia à la Manufacture – leçon de modestie

La Manufacture a programmé un spectacle au titre racoleur, en particulier dans le contexte du Off du Festival d’Avignon où tractages et parades cherchent chaque fois à vous convaincre qu’il ne faut absolument pas rater ce spectacle extraordinaire ! Les photos d’À ne pas rater sont cependant sobres et le texte de présentation facétieux. La réclame paraît en décalage avec le titre, et ce pied de nez titille, intrigue, donne envie de prendre le risque. Fallait-il ne pas rater ce spectacle ? Sera-t-il de ceux dont on fera la promotion à chaque détour de conversation avignonnaise en disant : il faut absolument que tu le voies ! ? Pas sûr… et pourtant, on ne regrette pas de l’avoir vu, on s’en féliciterait presque.
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« À la ligne » d’après Joseph Ponthus au Théâtre du Train bleu – poétique du travail en usine

Le Théâtre du Train bleu programme cette année un spectacle produit par le Théâtre de Lorient, dirigé par Rodolphe Dana, à la tête du collectif Les Possédés depuis devenu le Collectif Artistique du Théâtre de Lorient. Après avoir monté des textes de Lagarce ou de Tchekhov, le collectif a pris un plaisir particulier à adapter des romans : Bullet Park de John Cheever, À la recherche du temps perdu de Proust à deux reprises ou Madame Bovary de Flaubert. Le spectacle de Katja Hunsinger et Julien Chavrial, À la ligne, s’inscrit dans ce sillage. Il est une adaptation d’un roman de Joseph Ponthus publié en 2019 et plusieurs fois primé. Avec ce récit d’usine, les acteurs redisent leur foi profonde en la littérature, en sa capacité à dire le monde et à le faire voir quand elle est amenée au théâtre.
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« Le moine noir » de Kirill Serebrennikov dans la Cour d’honneur du Palais des Papes – le diamant noir de la folie

L’édition 2022 du Festival d’Avignon est inaugurée dans la Cour d’honneur du Palais des Papes avec Le Moine noir. Après Les Métamorphoses d’Ovide, un scénario de Lars von Trier, Les Idiots, et le roman inachevé de Gogol, Les Âmes mortes, le metteur en scène russe s’empare cette fois d’une nouvelle de Tchekhov. Son adaptation, construite comme un crescendo, mène du réalisme au mysticisme, suivant une montée en puissance d’autant plus impressionnante qu’elle est imprévisible.
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« La Bombe humaine » de Vincent Hennebicq et Eline Schumacher au Théâtre des Doms – ouvrir sur scène la boîte de Pandore de notre conscience écologique

Alors que La Bombe humaine est annoncé comme un spectacle sur la catastrophe écologique, la scène du Théâtre des Doms est recouverte de cotillons et de confettis. Mais qui a déjà cherché des décorations de fête non sans quelques scrupules d’acheter des consommables notera que celle-ci sont en papier crépon, et non en plastique. Ces premières réflexions en attendant le début du spectacle nous immergent d’emblée dans les questions qui seront soulevées ici, celles qui nous taraudent et composent désormais notre quotidien : notre éco-anxiété, nos compromis, nos dilemmes, nos inquiétudes et nos faibles espoirs – en deux mots, la boîte de Pandore de notre conscience écologique. Malgré les titres des chapitres qui composent le spectacle, le propos tissé n’est pas catastrophiste, ni non plus utopiste. Eline Shumacher et Vincent Hennebicq se tiennent sur le fil, au plus près de nos oscillations intimes.
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