Étiquette : corps

« Désobéir – Pièce d’actualité n°9 » de Julie Bérès à la Manufacture – la beauté sans pareil des filles de nos banlieues

Sur la patinoire de la Manufacture sont réunies quatre jeunes d’Aubervilliers ou des alentours, rencontrées par Julie Bérès dans le cadre du projet de la Commune, « Pièces d’actualité ». Reconduit pour une cinquième saison à partir de la rentrée prochaine, ce projet commande à des metteurs en scène des spectacles chargés de répondre à la question : « la vie des gens d’ici, qu’est-ce qu’elle inspire à votre art ? ». Une telle interrogation donne lieu à un théâtre de veine documentaire, qui approche des problèmes d’actualité et s’efforce chaque fois de dégager du sens et/ou de la beauté à partir d’un territoire qui cristallise tout particulièrement les contradictions de notre époque. Julie Bérès trouve cette beauté dans les récits de jeunes filles des banlieues, issues d’immigrations plus ou moins récentes, qu’elle fait porter par quatre actrices qui viennent avec leurs histoires à elles aussi et partagent sur ce plateau ce qu’elles sont, qui touchent profondément.
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« L’Avare » mis en scène par Ludovic Lagarde à l’Odéon – générosité d’un avare

En cette fin de saison, l’Odéon accueille L’Avare de Ludovic Lagarde, spectacle créé à Reims en 2014, au Centre dramatique national que dirige le metteur en scène. Depuis quatre ans, l’œuvre tourne à travers toute la France, et il est aisé de comprendre pourquoi : Lagarde s’empare d’un classique que le temps enrichit plutôt qu’il n’atteint, en offre une approche profondément corporelle qui met en valeur chaque nuance du texte de Molière, place au cœur de son spectacle un acteur qui transcende la scène et l’entoure d’autres comédiens qui sont loin de rester dans son ombre… Rien d’extraordinaire en apparence dans ce projet, et pourtant, le résultat, parce qu’il conjugue la puissance d’un texte, la performance remarquable d’acteurs et l’art abouti d’un metteur en scène, est fabuleux.
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« Re-Paradise » de Gwenaël Morin aux Amandiers – re-living the theatre

Pour fêter les 50 ans des événements de mai 1968, Philippe Quesne a invité plusieurs artistes au Théâtre Nanterre-Amandiers pour « défricher des territoires utopiques », au cours d’un Festival éloquemment appelé « Mondes possibles ». Sa proposition vise moins à commémorer le passé – comme l’affirme Sanja Mitrovic dans son spectacle, My Revolution is better than yours, faisant écrire en grosses lettres par un acteur « We don’t commemorate, we keep on fighting » – qu’à penser le présent, à partir de cet héritage bien particulier. De nombreuses formes artistiques sont ainsi accueillies, pour un temps de réflexion collectif. C’est dans ce contexte que Gwenaël Morin recrée Paradise Now, spectacle emblématique du Living Theatre présenté en juillet de cette fameuse année à Avignon.
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Le jeu, essence du théâtre à l’ère du cinéma selon Denis Guénoun

Si le personnage, ou au moins son efficacité, sa puissance imaginaires (et avec lui tout l’appareil de ses lieux, temps, actions supposés, ou au moins leur capacité d’envoûtement), ont déserté l’espace de la représentation théâtrale, cela signifie que sur scène, désormais, ne reste que le jeu. Bien sûr, on y croise encore des personnages, et des effets imaginaires liés aux rôles. Mais ce sont désormais des effets secondaires, qui ne soutiennent plus la singularité du théâtre, et ne portent plus en eux, ni avec eux, la raison de sa nécessité.
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« The Great Tamer » de Dimitris Papaioannou à la FabricA – sur la crête du sensible

Parmi les nombreuses manifestations rassemblées pour le Festival d’Avignon, il y en a qui lui sont propres, quoi qu’elles ne le définissent pas. Ce sont ces formes hybrides rassemblées dans la catégorie « Indiscipline », catégorie vaste et un peu malicieuse qui s’extrait des distinctions génériques et mêle le théâtre, la danse et la performance. L’œuvre de l’artiste grec Dimitris Papaioannou, The Great Tamer, créée en mai à Athènes et présentée à la FabricA, fait partie de ces spectacles, comme Espæce l’an passé, ou À mon seul désir de Gaëlle Bourges, qui illustrent la pertinence de cette catégorie transversale, qui déplace les lignes de la perception. À défaut d’un nom d’auteur, d’un titre de texte, la seule indication qui précède la découverte de l’œuvre est la suivante : « certaines scènes du spectacle comportent de la nudité ». Ce qui pourrait passer pour une revendication de modernité se révèle rapidement une nécessité : comment proposer une genèse de l’homme sans en passer par sa nudité première ? La genèse du « grand dompteur » d’images Papaioannou n’est pas biblique, ni historique, mais rêvée, onirique ; une genèse qui se passe du langage et laisse ainsi une part indécidable de subjectivité dans sa lecture – quoiqu’elle paraisse limpide.
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« Ludwig, un roi sur la lune » par l’Atelier Catalyse au TGP – théâtre fragile

Ludwig, un roi sur la lune, programmé l’été dernier au Festival d’Avignon, est repris cet hiver au Théâtre Gérard Philipe de Saint-Denis. Ce spectacle est la dernière création de Madeleine Louarn avec les comédiens handicapés mentaux de l’Altelier Catalyse. Celle qui était au départ éducatrice spécialisée a mené un long travail avec ces acteurs, et a monté déjà plusieurs spectacles avec eux, désormais formée pour la mise en scène.…

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« L’Immoraliste » d’André Gide – conversion ou déchirement

Après avoir rencontré un certain succès avec les Nourritures terrestres en 1897, Gide reprend quelques années plus tard la même période de sa vie pour s’inspirer de son nouveau roman, L’Immoraliste. Les événements à peine perceptibles en filigrane dans son œuvre-poème sont ici ramenés au premier plan, et l’éthique louée sur le mode de l’incantation persuasive est désormais présentée au travers d’une découverte par l’expérience.…

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