« Vider Vénus » de Gaëlle Bourges au Carreau du Temple – beau comme la rencontre fortuite sur une scène du strip-tease et de l’histoire de l’art
Au Carreau du Temple, sont repris les trois premiers spectacles de Gaëlle Bourges, sous la forme d’un triptyque intitulé Vider Vénus. Ces trois spectacles, Je baise les yeux, La Belle Indifférence et Le Verrou, ont été conçus entre 2008 et 2012 comme le rappelle une voix off, une fois les lumières de la salle éteintes, dont l’un des fils rouges qui les unit est la pratique du strip-tease. La voix off poursuit en précisant que le sujet était alors moins visibilisé qu’aujourd’hui, mais aucune modification n’a été apportée aux spectacles entre temps, et, pour déjouer leur caractère potentiellement périmé, elle invite à les aborder comme des archives, des documents du passé. Une immense pertinence se dégage pourtant du propos de ces trois œuvres, qui en outre se révèlent fondatrices dans le rapport à l’histoire de l’art que Gaëlle Bourges a tissé de manière extrêmement singulière tout au long de sa trajectoire. Un rapport d’appropriation des grandes œuvres par l’écriture, le corps et la scène, tout à la fois facétieux, érudit, irrévérent et profondément vivant.« Sans tambour » de Samuel Achache au Cloître des Carmes – symphonie d’émotions hors des mots
Sept ans après Fugue au Cloître des Célestins, Samuel Achache est invité à investir un autre Cloître du Festival d’Avignon, celui des Carmes, avec sa nouvelle création, Sans tambour. Le public est nombreux, mondain, pressé de s’offrir un de ces objets incomparables dont l’artiste a le secret, objet composé de musique et d’humour, dont la clé dramaturgique nous reste secrète mais qui nous invite pour cette raison à un investissement subjectif conséquent. Avec ce spectacle, Achache fait du spectateur un être de pure émotion, bien en peine de rendre compte de tout ce qu’il a vu et entendu et de tout ce qui l’a traversé.« Théorème(s) » de Pierre Maillet à la Comédie de Caen – la jouissance à tout prix
D’un roman né de la réalisation d’un film de Pasolini, Pierre Maillet a entrepris de faire une adaptation. Ce faisant, il tire parti de l’art hybride de l’artiste italien, écrivain, poète, journaliste et encore réalisateur, qui avait rêvé de donner une forme théâtrale à son œuvre, Théorème. Entouré d’une dizaine d’acteurs à l’énergie communicative, Pierre Maillet réalise ce rêve et s’approprie ce texte singulier, qui offre le récit d’un ange qui passe dans une famille et en désaxe tous les membres. La structuration de l’œuvre en deux parties, de la séduction à l’abandon aux multiples conséquences, aurait probablement réclamé une rupture plus nette dans le spectacle, mais la jubilation première l’emporte sur la gravité – scindant la perception entre le partage authentique de cette jubilation et l’impression de désinvolture que laisse la fin du spectacle.« Jusque dans vos bras » des Chiens de Navarre aux Bouffes du Nord – le rire contre les larmes
Depuis Quand je pense qu’on va vieillir ensemble en 2013 et les Armoires normandes en 2015, qui sondaient respectivement nos névroses et notre rapport à l’amour, le collectif les Chiens de Navarre ont pris le temps de travailler à leur nouveau spectacle, Jusque dans vos bras, créé en juin 2017 à Lyon. Se faisant cette fois la caisse de résonance de l’actualité, particulièrement vive et suivie pendant la campagne présidentielle, ils entreprennent ici d’interroger le concept d’identité française. Pour traiter ce thème pour le moins problématique, de grandes figures de l’histoire nationale sont invoquées avec humour et provocation, et des réalités délicates sont évoquées selon une approche très peu politiquement correcte. Ces détours permettent de penser l’impensé ou l’impensable, d’apprivoiser des idées lointaines ou étrangères, et d’élaborer des scénarios utopiques. Mais ces exercices de gymnastique intellectuelle ne sont jamais à prendre tout à fait au sérieux, et ce qui domine, avant toute chose, c’est le plaisir de la dérision et du jeu.« La Cerisaie » de Tchekhov à la Colline : les tg STAN se mettent en scène
De la salle de la Bastille, les tg STAN passent au vaste plateau de la Colline pour cette nouvelle édition du Festival d’Automne. Des Estivants de Gorki il y a trois ans, ils passent à la Cerisaie de Tchekhov – où il est question d’estivants, là aussi.…
« Das Weisse vom Ei – Une île flottante »
d’après Labiche à l’Odéon : mécaniques du rire
En 1991, Christoph Marthaler monte L’Affaire de la rue Lourcine d’Eugène Labiche, et collabore pour la première fois avec Anna Viebrock, qui signe par la suite la scénographie de tous ses spectacles. Près de vingt-cinq ans plus tard, il revient à cet auteur avec un montage de textes à partir de courtes pièces, parmi lesquelles La Poudre aux yeux, qui donne leurs noms au personnage.…
« King Lear fragments » d’après William Shakespeare par le Collectif Mains d’Œuvre
Le Collectif Mains d’Œuvre propose au Théâtre des Halles une délicieuse appropriation de la pièce de William Shakespeare. Dans l’intimité de la Chapelle Sainte-Claire, ils sont deux comédiens, drôles, touchants et vraiment doués, qui nous racontent cette histoire, cherchent à nous la faire comprendre, mais aussi la jouent, en dosant parfaitement le tragique et le comique.…
« Le Dindon » de Georges Feydeau par la Compagnie le Théâtre du Kronope
Après plusieurs créations en grande majorité fondées sur des œuvres du XVIIe siècle, le Théâtre du Kronope s’empare cette fois du fameux Dindon de Georges Feydeau. Sur la scène sont donc confrontés deux genres comiques qui n’ont a priori rien à voir : le théâtre de boulevard et la Commedia dell’arte.…