Cet article propose une analyse dramaturgique du spectacle Persona. Marilyn créé par Krystian Lupa en avril 2009, et s’attache à montrer que pour sonder la personnalité scindée de la star, le metteur en scène polonais accorde une place déterminante à un projet de théâtre qu’avait authentiquement Marilyn Monroe : interpréter le rôle de Grouchenka dans une adaptation des Frères Karamazov qu’avait envisagée son dernier mari, Arthur Miller. Le vertige du dialogue dramaturgique établi entre l’icône de la culture américaine des années 1960 et l’un des personnages emblématiques de la littérature russe est décuplé par le souvenir de l’adaptation que Lupa a lui-même faite du roman de Dostoïevski en 1990, par le personnage de Paula Strasberg dans la pièce, double déformé voire dégradé du metteur en scène, et par le travail d’appropriation de Marilyn par l’actrice Sandra Korzeniak.
Article publié dans le n°9 de la Revue d’Études culturelles,
« Jouer Marilyn », dir. Florence Fix et Corinne François-Denève
Cette fois-ci, nous n’avons pas d’œuvre dramatique…
pas d’histoire non plus…
seulement une personne et sa personnalité.
L’homme en tant que tel est à la fois une œuvre dramatique et une histoire.[1]
Quelques mois après Factory 2, « fantaisie collective inspirée d’Andy Warhol », Krystian Lupa semble une nouvelle fois délaisser la littérature lorsqu’il crée Persona. Marilyn en 2009. Dès le titre de son spectacle, le metteur en scène polonais met en évidence le caractère construit du personnage historique qui l’intéresse, personnage d’abord façonné par Norma Jean elle-même puis plus encore par tous les regards auxquels elle s’est trouvée exposée. « Persona » désigne en effet le masque de l’acteur grec, qui porte sa voix et permet d’identifier son rôle. Lupa, qui considère Jung comme son « maître spirituel »[2], prend également en compte le sens de « masque social » qu’attribue la psychologie analytique à ce terme. Avant lui, ces deux sens ont été articulés par Bergman, dans un film qui relate la crise d’une actrice qui cherche à se libérer de tous les masques qu’elle porte, sur scène et dans la société, et qui s’enferme dans le silence avant de se retirer dans une maison en bord de mer avec une infirmière. Ce film ne sert pas simplement d’intertexte au spectacle de Lupa ; il est explicitement posé comme point de départ dramaturgique du troisième volet de sa trilogie Persona, « Le corps de Simone »[3].
D’emblée, Lupa exhibe donc le masque, mais comme pour mieux annoncer qu’il va chercher à atteindre le moi fragile qui cherche refuge derrière lui. Au-delà du mythe Marilyn Monroe, de la bimbo inlassablement photographiée et de la star constamment exposée aux feux des projecteurs, l’intéresse l’être dépossédé de lui-même par la célébrité[4]. Pour approcher cette personnalité, Lupa n’adopte pas une démarche biographique et ne revendique pas même prendre appui sur des documents ou des archives – alors que la lecture des textes intimes de Marilyn[5] ou de Marilyn et moi[6] de Susan Strasberg révèle que de nombreuses répliques de sa pièce sont des citations de l’actrice ou de ses proches[7]. Bien loin d’exhiber le vaste travail d’innutrition qui caractérise sa pratique, Lupa annonce même prendre ses distances avec la réalité historique dès les premières lignes du texte par lequel il présente son spectacle :
Andy Warhol disait que le sujet et le personnage principal de ses films, c’était la personnalité d’un être humain, avec tout son « inexprimable », et non pas son histoire et son destin. Si l’on considère qu’un être humain est un objet alors il vaut mieux le regarder que raconter des histoires sur lui.[8]
Pour « regarder » Marilyn Monroe, faire de l’« inexprimable » de sa personnalité le sujet de son spectacle, Lupa ne raconte pas son histoire, ou même une histoire, mais choisit de la saisir au moment critique où elle disparaît aux yeux du monde pendant quelques jours. Dans le studio abandonné dans lequel elle s’est retirée, viennent successivement la trouver sa professeure de théâtre, son photographe, le gardien des lieux et son thérapeute. Quoique cette situation de crise suffise à mettre en évidence l’éclatement de son être derrière tous les masques que chacun de ses interlocuteurs cherche à lui faire porter, Lupa ne s’en tient pas là et sous-tend leurs dialogues vagabonds par un rêve de théâtre qu’avait authentiquement Marilyn, celui d’interpréter le rôle de Grouchenka dans une adaptation des Frères Karamazov. En démultipliant en outre les effets de mise en abyme dans son texte et dans sa mise en scène, en donnant à voir dans son spectacle l’actrice Sandra Korzeniak au travail avec le personnage de Marilyn et en dialoguant de manière souterraine avec sa propre adaptation des Frères Karamazov[9], Lupa stratifie encore sa dramaturgie et donne à son œuvre la forme d’un kaléidoscope aux mille facettes qui livrent chacune un reflet – imparfait – de Marilyn.
L’enjeu est dès lors de rendre compte des multiples niveaux de cette dramaturgie, de s’enfoncer progressivement en elle pour mettre en évidence sa densité mais aussi l’effet de vertige qu’elle produit – un vertige qui donne l’impression d’approcher, grâce au théâtre, la personnalité abyssale de Marilyn.
1. Marilyn en crise
Le spectacle commence avec la fin d’une conversation téléphonique, un appel à l’aide adressé à un proche alors que Marilyn se trouve seule sur scène. L’actrice, Sandra Korzeniak, est immédiatement assimilée à son personnage par le titre du spectacle mais aussi par sa chevelure blonde et son grain de beauté au coin de la fossette. Loin d’être apprêtée, elle est cependant décoiffée et elle ne porte qu’un pull noir trop grand en-dessous duquel ses jambes et ses pieds restent nus. Outre ces premiers indices, la crise que traverse le personnage est exprimée par la scénographie, qui représente un lieu délabré et non identifiable. Au centre du plateau, des tables encombrées de feuilles, de livres, de vêtements, de draps, de cendriers, de bouteilles et de verres. Autour, des chaises dépareillées, des portants de vêtements, un miroir psyché, un fauteuil de barbier et un vélo. L’espace est encore structuré par trois portes, de grandes fenêtres opaques et un escalier qui ne mène nulle part.
Peu après avoir raccroché, Marilyn se place face à son reflet pour se peindre les lèvres, ce qu’elle fait, dit-elle, « chaque fois qu’elle a un peu peur »[10]. Après cet aveu, elle se scinde et se demande à elle-même : « De quoi as-tu peur ? »[11]. S’ensuit un monologue à l’adresse trouble, dans lequel il est question d’un amour perdu, simplement attaché au prénom d’Arthur. C’est de Miller dont il est question, mais Lupa, ici comme plus tard, met de côté le biographique, encombrant et didactique, pour se concentrer sur l’état de Marilyn. Un état dont la fragilité est confirmée par l’évocation d’insomnies, de pratiques hypnotiques et plus encore d’un séjour en hôpital psychiatrique. Le monologue pourrait se poursuivre et permettre ainsi l’introspection du personnage, mais Lupa choisit plutôt d’approfondir l’exploration de son être malade par la confrontation avec plusieurs proches, qui viennent à tour de rôle trouver Marilyn dans sa retraite.
Dès son arrivée, Paula (Strasberg, sa professeure de théâtre) souligne le caractère critique de la situation en décrivant l’hystérie dans laquelle sa disparition a plongé la ville – description assortie d’un comportement lui-même hystérique qui révèle aussitôt que la crise que traverse Marilyn est à l’origine d’autres crises. À la fin de leur dialogue, Paula avoue: « Moi aussi je craque ! »[12]. De manière plus spectaculaire encore, Ralph (Greenson, son thérapeute) en vient à dire à Marilyn qu’elle n’a pas le droit d’interrompre leur travail en séances, car il a besoin d’elle plus encore qu’elle n’a besoin de lui. Chaque fois sommée de justifier sa disparition, Marilyn explique s’être retirée dans cet endroit étrange qu’elle désigne comme une salle de répétition « du temps de Chaplin »[13] pour être au calme et travailler. C’est à André (de Dienes, son photographe) qu’elle en dit le plus, et à qui elle confie le soulagement qu’elle a trouvé dans ce lieu : « À présent, je suis heureuse, cachée dans une existence anonyme. / Une personne »[14].
Ce soulagement de l’anonymat est cependant mis à l’épreuve de multiples assignations. Chacun de ses interlocuteurs, en affirmant de manière plus ou moins péremptoire qui elle est ou ce qu’elle est, cherche à contenir sa personnalité chaotique, à lui rendre forme alors qu’elle menace de se dissoudre – personnalité autant composée qu’affaiblie par tous les fantasmes projetés sur elle. Paula, lorsqu’elle découvre l’œil au beurre noir de Marilyn, s’exclame : « Ce n’est plus ton visage ! »[15]. Ne réussissant pas à la ramener à la raison par les différents détours qu’elle emprunte, Paula finit par lui déclarer de but en blanc : « Tu ne réalises pas l’importance de ta position dans le monde ! / Tu es le plus grand symbole de l’histoire de l’humanité »[16]. Elle poursuit en affirmant qu’il est de son « devoir » de le reconnaître, pour elle-même comme pour les autres. Entraînée dans son élan, Paula achève de manière paroxystique : « Tu es la créature la plus sublime de notre temps, de tous les temps, de tous ceux que tu veux ! Plus grande que qui que ce soit, que qui tu voudras, je veux dire. Tu es plus importante que le Christ ! »[17]. Loin de se repentir de cet excès, elle redit encore plus tard : « Tu es une divinité, Marilyn. […] Tu dois apporter et imposer quelque chose à ce monde ! »[18]. Alors qu’elle décrète par ailleurs que Marilyn « ne peu[t] pas » être neurasthénique[19], Paula laisse entendre que cette surconstruction de sa personnalité par « le monde » peut avoir une fonction rédemptrice dans l’état de crise dans lequel elle se trouve.
Par contraste, André paraît laisser à Marilyn la liberté d’être ce qu’elle veut. Aussitôt après le départ de Paula, il lui demande : « En quoi t’est-elle utile ? Tu sais ce que tu veux et mieux que tout le monde… Toute seule, tu n’y arriverais pas ? »[20]. André assigne cependant Marilyn autrement que par le langage. Vêtu d’un t-shirt à son effigie, il l’invite à se mettre nue et à prendre certaines poses. Marilyn s’exécute, apparemment de bonne volonté, mais elle apparaît prisonnière de son regard lorsqu’après avoir protesté, elle demande à André de lui montrer la photographie qu’il a prise contre son gré. Plus tard, Marilyn lui avoue : « Tu fais quelque chose de moi… Je ne sais même pas ce que c’est… »[21]. Et quand elle lui demande pourquoi elle se laisse photographier, André répond de manière catégorique : « Tu es belle, la beauté doit être photographiée »[22].
Lorsqu’après l’entracte le gardien des lieux rôde autour de Marilyn endormie, il la ramène à un pur objet de désir. Cette possible définition d’elle-même est cependant troublée par le fait que c’est elle qui amorce leur rapport sexuel, inversion qui l’amène à demander à Francesco : « qui suis-je ? » – question qui reste sans réponse. Celles que lui apportent ensuite son thérapeute ne sont pas plus satisfaisantes. D’emblée, Greenson lui reproche d’avoir gâché leur travail : « toutes ces tentatives laborieuses pour vous aider, vous dénouer en tant que… / En tant que qui ? / En tant que personne »[23]. Sans s’embarrasser de quelconques précautions, il lui dit qu’elle est une masochiste, une alcoolique entêtée, une exhibitionniste, qui n’a pu se contenter de son « immense et authentique succès »[24]. Lorsque Marilyn lui demande : « Allez, dites-moi qui je suis ! », Greenson se dérobe : « Pas tout de suite… », avant de l’attaquer à nouveau : « Vous avez adopté une attitude fausse, Marilyn… […] / Et cela vous fascine, cela vous ravit… / Et c’est ce qu’il y a de pire… et de navrant… »[25]. Après lui avoir encore reproché sa « coupable beauté »[26], Greenson la quitte en lui laissant des somnifères.
Bien loin de résoudre la crise que traverse Marilyn, chacun de ses interlocuteurs paraît l’aggraver. Pour dénouer cette situation insoluble, Lupa conclut avec une dernière scène, le « Rêve du grand mage ». Pour la première fois, Marilyn apparaît telle que son public la connaît, dans « un costume provocant de star de cinéma »[27]. La scène prend l’allure d’un cauchemar quand Paula la déshabille en lui reprochant sa tenue, qu’un réalisateur lui annonce sa scène et qu’un « Grand Mage » lui demande : « Où est ta personnalité, selon toi ? »[28]. Marilyn confie à Paula avoir peur, ne pas savoir ce qu’elle doit faire, mais elle est bientôt prise dans un mouvement d’ensemble et allongée sur la table centrale. Filmée en direct, elle devient victime expiatoire quand son image prend feu.
Convaincu qu’une crise est capable de mettre à nu la personnalité, de la rendre « visible »[29], Lupa étire celle de Marilyn par les allées et venues de plusieurs personnages et par quelques coups de téléphone à l’origine de dialogues qui dressent progressivement un anti-portrait d’elle, dans lequel ses masques et leur négation donnent à percevoir un être aux limites instables et mouvantes[30]. Déjà remarquablement efficace, cette dramaturgie est amplifiée par un rêve de théâtre, grâce auquel Lupa prend en compte la « version potentielle non accomplie » de Marilyn, qui fait encore partie de la personnalité d’un individu selon lui[31].
2. Le rêve de Grouchenka
Dans son spectacle, Lupa accorde une place déterminante à un projet de théâtre que Marilyn Monroe formule lors d’une conférence de presse dès 1955, et qu’elle croit pouvoir réaliser avec Arthur Miller : celui d’incarner le personnage de Grouchenka, dans une adaptation théâtrale des Frères Karamazov. L’abandon de ce projet est l’une des conséquences de la séparation du couple, évoquée dès le premier monologue du personnage. Paula insiste ensuite sur le fait que ce spectacle ne verra pas le jour, non seulement parce que Miller n’a pas été capable d’écrire une page de cette adaptation mais aussi parce que Marilyn a délaissé le théâtre. C’est pourtant par ce rôle et par le théâtre que Marilyn espère se libérer de sa persona de star.
Peu après son arrivée, elle explique en effet à Paula l’avoir fait venir jusqu’à elle pour lui montrer son travail sur une scène déterminante dans la trajectoire de Grouchenka, celle de sa conversion, à la fin de la nuit de fête à Mokroïé. Le choix de cette scène crée un premier effet de vertige : malgré la réputation d’« enjôleuse » qui la précède, de séductrice qui manipule le désir des hommes pour parvenir à ses fins, Grouchenka est une femme vertueuse, qui ne s’est donnée ni au père Karamazov, ni à son fils Mitia qui la convoite aussi, ni à personne d’autre que son premier amant, un Polonais qui l’a abandonnée plusieurs années auparavant. C’est justement lui que Grouchenka va retrouver à Mokroïé avec l’intention de lui pardonner, loin de la ville où se déroule le parricide la nuit-même de son départ. L’homme qu’elle retrouve est cependant un être vulgaire, seulement intéressé par son argent, qu’elle décide de quitter aussitôt. Encore lourde du deuil de son premier amour, elle se tourne vers Mitia, venu la retrouver à Mokroïé, et dans l’ivresse de la fête qu’il organise, elle lui dit qu’elle l’aime et rêve avec lui d’un avenir heureux à labourer la terre. La scène que choisit de travailler Marilyn dans sa retraite est donc un moment de crise et de révélation, où se mêlent de manière indissociable la douleur d’un amour mort et l’espoir sincère de se libérer du passé grâce à Mitia et une vie nouvelle. D’emblée, Paula demande : « Pourquoi précisément commencer à travailler sur ce passage ? / À l’endroit… Marilyn, comprends-le bien… qui ne peut être un point de départ »[32]. Marilyn répond être hantée par cette scène, en avoir compris quelque chose, et l’interprétation extrêmement douloureuse qu’elle en propose, désespérée alors que la résolution de Grouchenka d’aller travailler la terre est pleine d’espoir, révèle que son identification à ce personnage repose sur sa séparation avec Arthur Miller, superposée à celle de Grouchenka avec son Polonais. Pour vivre pleinement sa conversion et tendre vers « la joie indescriptible de reconnaître son véritable amour »[33], lui manque cependant un Mitia.
Afin de l’aider à trouver cette joie, physiologique selon elle, Paula met l’accent sur le corps de Grouchenka, fatigué par l’ivresse et les danses. Marilyn met de la musique pour qu’elles se mettent en condition, mais leur danse reste désespérée : « Paula essaye de prendre de la vitesse, de se mettre à vibrer. Le rire de Marilyn l’attire vers le bas, vers le sol, dans une forme de lassitude et de molle volupté »[34]. Un dialogue dramaturgique ténu s’engage, au cours duquel Marilyn oppose sa lecture de la scène à celle de Paula et explique pourquoi elle ne peut danser :
J’aime soudainement Mitia ou bien je veux l’aimer.
Je crois être capable de surmonter cette douleur.
Sauf que je n’arrive pas à la surmonter.
Avec l’autre c’était faux… et je le réalise…
Je sais peu de choses mais je suis sûre de cela.
C’est comme ça, je l’ai aimé cinq années durant.
La vie, ma vie passait en vain.
Je sens toujours cette douleur dans mon corps.
Je n’arrive pas à chasser ce cadavre.
[…]
Mon Dieu, Paula ! Je renvoie Mitia, « Va, amuse-toi ! », afin de rester seule un moment, de pouvoir le faire toute seule. Que cela sorte de mon corps. Je ne sais pas… comme un accouchement honteux, physiologique. Chasser de son corps le cadavre de l’autre amour, ce poids, cette souffrance… Mais ça ne vient pas.[35]
Paula a beau la contredire, Marilyn refuse de l’entendre décréter que sa lecture est fausse, car, déclare-t-elle : « C’est justement ma vérité ! »[36].
La surdité de Paula à cette vérité n’est pas la conséquence d’interprétations contradictoires du roman de Dostoïevski, qui rend possible leurs deux lectures. Dès les premiers instants, Paula comprend que Marilyn cherche à se dire à travers ce rôle, et entreprend de faire de ce travail un terrain de discussion grâce auquel la sortir de sa crise, voire faire naître en elle la joie de Grouchenka. Elle l’invite à envisager ce personnage comme « un matériau à partir duquel [elle va] créer une nouvelle Marilyn Monroe ! »[37]. Elle échoue cependant à se faire entendre au travers de ce personnage et y renonce, concluant que « c’est un cercle vicieux », car Marilyn « veu[t] noyer Grouchenka dans [sa] propre… dé… / Elle cherche le mot, elle rejette le mot “dépression” »[38] – constat qui l’amène à lui dire de manière explicite ce qu’elle représente selon elle aux yeux du monde.
Au-delà de cette scène intitulée « Grouchenka », Marilyn reste imprégnée par le personnage et par le roman de Dostoïevski. De manière explicite, elle confie à son photographe que Grouchenka mûrit en elle et la transforme : « Elle m’apprend à vivre, à nouveau, sans culpabilité, André ! »[39]. De manière plus souterraine, elle appelle le photographe Aliocha, du nom du plus jeune des frères Karamazov, celui que Grouchenka aime comme un frère. Puis elle rejoue, sans qu’André le comprenne, la scène qui précède le départ de Grouchenka à Mokroïé, lorsqu’elle lui dit : « Je peux appeler celui que je détestais, je peux faire la paix avec lui… »[40] – réplique qui reste en suspens, interrompue par les directives d’André qui lui demande de s’allonger pour de nouvelles photographies. De façon comparable, lorsque Marilyn suggère que Francesco, le gardien des lieux, est un homme dangereux, et qu’elle lui demande : « est-ce que c’est vrai que tu as tué une femme ? », elle semble se souvenir des craintes refoulées de Grouchenka, qui voit du sang sur la chemise de Mitia et renonce à comprendre d’où il vient.
Avec son thérapeute, Grouchenka devient à nouveau un objet d’introspection pour Marilyn. Après lui avoir reproché de l’éloigner de la joie de Groucha, de son « amour porteur de vie » par la psychanalyse, elle révèle l’ampleur de son identification au personnage lorsqu’elle dit que comme elle, elle boit, elle pleure et ne dort pas. Greenson rétorque violemment que Grouchenka serait « incapable d’assumer un travail quelconque », qu’au bout d’une heure, « elle en aurait eu marre » et qu’elle « aurait changé d’avis, aurait inventé une ineptie de plus dans laquelle elle aurait embarqué » Mitia[41]. Comme Paula, il en vient à parler de Marilyn au travers de Grouchenka, lorsqu’il la réduit à un totem autour duquel les hommes dansent, à une ensorceleuse dont le charme ne réside qu’en l’alcool. L’indistinction entre le personnage de Dostoïevski et sa patiente se manifeste encore lorsqu’il dit qu’elle est obsédée par la pensée « que l’on copule avec Marilyn Monroe »[42] – pensée qui obnubile aussi Grouchenka. Marilyn lui donne en partie raison lorsqu’elle relate au sujet de Miller : « Il a eu comme une révélation que je n’étais qu’une putain, que je ne pensais qu’à me faire sauter… »[43]. Alors que Dostoïevski a selon elle « sauvé » Grouchenka, Miller, lui, l’a transformée « en pute sur ses feuilles »[44]. Si leur relation a pris fin, Marilyn ne renonce pas pour autant à son rêve de théâtre, et jusqu’aux derniers moments de son dialogue avec son thérapeute, elle redit l’espoir d’une vie nouvelle avec les mots de Grouchenka : « Je veux gratter la terre avec mes doigts… Vous comprenez ? / J’ai un avenir devant moi et suis impatiente de le vivre »[45].
En s’emparant du rêve de Marilyn jamais réalisé d’incarner sur scène le personnage de Grouchenka, Lupa déconstruit le mythe de la femme fatale qui colle à la peau de l’icône de la culture américaine des années 1960 comme à l’un des personnages féminins les plus emblématique de la littérature russe. Plus encore, en imaginant Marilyn travailler la scène de la conversion de Grouchenka, en superposant deux moments de rupture dans la trajectoire de ces femmes, il amplifie la crise que traverse Marilyn et le pouvoir de révélation qu’elle a sur sa personnalité. Avant même de prendre en compte le fait que Lupa, près de vingt ans plus tôt, a lui-même adapté Les Frères Karamazov, et de voir comment ce précédent spectacle innerve celui-ci, le vertige dramaturgique mis en place par ce sous-texte dostoïevskien est encore approfondi par de nombreux et discrets effets de métathéâtralité – effets qui décuplent les questionnements soulevés par Marilyn et font du théâtre un endroit ontologique trouble grâce auquel s’approcher au plus près de l’envers de sa persona.
3. Vertiges dramaturgiques
Au début du spectacle, après avoir raccroché le téléphone, Marilyn se tourne vers la salle et semble s’adresser à elle, tout en enclenchant la projection d’une image vidéo qui redouble la perception de la scène. Par la suite, la présence des spectateurs est à nouveau mise en évidence lorsque Marilyn installe Paula dos à la salle pour lui jouer la scène qu’elle a travaillée. En attendant que Marilyn se prépare, Paula se tourne vers le public et le regarde attentivement, regard transgressif qui en plus de réenclencher la caméra interrompue par son arrivée laisse incertaine sa prise en compte du public. André accroît le doute immiscé lorsqu’il dit, dans un état de perception altéré par un joint de marijuana et un verre d’alcool, qu’il croit voir « des gens… un public… » qui les regarde[46]. Il poursuit : « Je crois qu’on est en train de jouer pour eux »[47]. En plus de brouiller les coordonnées de l’espace et de la représentation, cette réduction de notre présence à une « potentialité », « une hypothèse faite par certaines personnes et réfutée par d’autres »[48], questionne notre appréhension de la scène, et plus précisément de Marilyn. Tout en rétorquant à André que « ce n’est qu’illusion », celle-ci admet un instant cette illusion et dit : « J’aimerais être nue devant eux… anonyme… Juste être, et qu’ils n’exigent rien de plus »[49].
Outre ces redoublements de notre perception de la scène et cette considération fluctuante de notre présence, les effets de métathéâtralité se multiplient avec la présence de Paula. S’il n’est jamais explicitement fait référence à la méthode de l’Actors Studio que son mari Lee Strasberg enseignait à New-York, Lupa en explore les principes grâce à la séance de travail de Paula avec Marilyn. Les didascalies par lesquelles il décrit l’arrivée de Paula sur scène sont d’emblée éloquentes : « Elle regarde autour d’elle de façon peu logique, comme par impulsion, de l’intérieur, à partir de ce qu’elle a amené avec elle, réellement plus que de l’extérieur, comme s’il s’agissait de mettre de l’ordre dans sa tête… »[50]. Plus loin, l’indication de jeu est si détaillée qu’elle donne l’impression d’assister au travail du metteur en scène en répétition :
Fouillons un peu : Paula n’accepte pas la tentative sauvage et non-pragmatique de travailler Grouchenka – sans continuer le projet, sans un retour à New-York et au théâtre, là où est sa place et celle de Marilyn ; sans Lee, qui a téléphoné hier, complètement hystérique, pour dire qu’il était malade.[51]
De manière plus directement sensible, le travail qu’exige la méthode Strasberg, héritée de Stanislavski, est donnée à percevoir par les réticences de Marilyn de commencer à jouer. Elle dit à Paula que celle-ci n’est « pas prête » à la voir jouer[52]. Pour l’aider à se mettre en condition, « pour permettre à Groucha une plus grande solitude », Paula finit par masquer son visage de ses mains[53]. L’intensité avec laquelle Marilyn interprète alors le rôle de Grouchenka, la profondeur de son identification à ce personnage qu’elle décrit ensuite avec l’un ou l’autre de ses interlocuteurs, est annoncé par une indécision dans les didascalies, entre l’actrice et son personnage. D’abord, « Marilyn-Groucha attend la fin de sa vision »[54]. Puis, l’enchaînement des répliques et l’usage de guillemets signalent un point de passage de l’actrice à son personnage :
Marilyn. – Paula, attends. Ne dis rien, pas encore…
Groucha. – « Tu m’entends ? Aliocha l’a ordonné. Nous irons chez elle tous les deux.
Nous allons nous incliner devant elle afin qu’elle nous pardonne.
Ensuite, nous partirons… En Sibérie, il y a de la neige… ».[55]
Le vertige pirandellien de voir une actrice interpréter le rôle d’une actrice qui travaille un rôle se creuse avec le constat que les répliques de Grouchenka sont reprises presque au mot près de l’adaptation qu’a créée Lupa en 1990 des Frères Karamazov. Si au début de Bracia Karamazow Grouchenka – interprétée par une autre actrice – paraissait simplement une projection fantasmatique dans la perspective des hommes de la famille Karamazov, Lupa lui donnait pleine consistance grâce à la longue scène de la fête à Mokroïé – celle-là même qui intéresse Marilyn. Jusque-là objet, Grouchenka devenait sujet non pas tant par les promesses d’avenir qu’elle faisait à Mitia mais parce que Lupa la donnait à voir dormant et rêvant sur scène, et mettait ainsi en partage sa subjectivité.
Un autre degré de métathéâtralité est encore atteint lorsque sont prises en compte les méthodes de travail de Lupa avec ses acteurs. Par les indications qu’elle donne à Marilyn, Paula apparaît comme un double du metteur en scène – un double déformé, voire dégradé, mais un double malgré tout. Ainsi quand elle lui dit :
Essaye de prendre un élan comme un corps qui quitte une danse. Fatigué, vibrant tout entier. Ensuite, tu pourras tenter ce que tu cherches. La même chose, et en même temps quelque chose de tout à fait nouveau, qui va te surprendre. L’étonnement est indispensable.[56]
Plus tard, Paula propose encore : « On pourrait retravailler l’intonation, le paysage… Le corps ! Pour approfondir la douleur »[57]. Elle reprend ici l’une des notions que Lupa s’est forgées comme outil pour travailler avec ses acteurs, qu’il redéfinit constamment :
Le paysage est le contenu et la saisie de l’imagination par lesquelles l’acteur dans une situation spatiale donnée devient un personnage. Ce sont les variations de l’imagination qui ouvrent le corps et y pénètrent ; alors le corps reçoit une réponse […] Le paysage prend une forme incarnée, parfois d’impératif, parfois de désir, parfois de tentation, ou de décision. L’imagination sous forme corporelle déjà, implantée dans le corps, possédant le corps.[58]
Au-delà de la scène entre Marilyn et Paula et même au-delà des nombreuses mentions faites au personnage de Grouchenka, Lupa met encore en évidence le travail théâtral. Marilyn évoque ainsi à Greenson un rôle de « pétasse névrosée »[59] qu’elle a endossé pour un tournage, qui l’a si fortement imprégnée qu’elle se sent devenir « cette gourde mollassonne »[60]. C’est précisément pour se libérer de ce rôle, pour « devenir une autre » grâce au personnage de Grouchenka[61] qu’elle s’est retirée dans ce studio délabré. Pour appuyer les propos de Marilyn, leur donner de l’ampleur au-delà de sa dépression, Lupa donne à voir dans le cours du spectacle le travail de l’actrice qui l’incarne sur scène, Sandra Korzeniak, grâce à la projection d’une vidéo préenregistrée. Plusieurs projections similaires précèdent celle-ci, et suggèrent qu’il s’agira sans doute d’un nouvel essai de Marilyn pour interpréter le rôle de Grouchenka. Il n’est cependant pas cette fois question de convaincre Mitia de labourer la terre et l’actrice n’a plus la chevelure blonde de Marilyn. Après une série de questions, elle ordonne : « Lâchez-moi avec cette image. Je ne peux plus supporter cette vision rêvée que vous avez tous »[62]. Puis elle demande : « Et moi, où suis-je dans tout ça ? Où ? »[63]. Ces questions prennent une tout autre portée quand une réponse est avancée :
Je suis moi, Sandra, qui, en quelque sorte est un être infirme, blessé, laid, impuissant… Je ne serai jamais cet idéal. Et pour vous, Marilyn Monroe est un idéal. Mais moi, je ne le serai jamais. Je ne le suis pas. Je ne cherche pas à savoir comment jouer un personnage idéalisé, rêvé de tous, sinon… tu as simplement perdu d’avance.[64]
Pour la première fois depuis le début du spectacle, l’actrice qui incarne Marilyn, qui paraît s’être fondue dans son rôle, s’être totalement effacée derrière son personnage dont elle a repris quelques attributs emblématiques pour asseoir son identification, est donnée à percevoir en tant qu’elle-même. Les questions qu’elle se pose sur sa capacité à correspondre à l’idéal Marilyn Monroe, au rêve que le public en a, donnent une résonance extraordinaire à celles qui écartèlent son personnage.
Un entretien de l’actrice révèle que les interrogations soulevées dans cette improvisation filmée ne sont pas dictées par Lupa. Sandra Korzeniak y confie la difficulté à travailler ce personnage, « insondable et fascinant », difficulté qu’elle attribue au fait que Marilyn est « changeante », « qu’il est impossible de saisir en elle une chose à laquelle s’attacher », car « elle s’est littéralement “offerte à la dévoration” et n’a rien gardé pour elle »[65]. L’actrice poursuit en décrivant son travail d’appropriation, d’identification et de recréation du personnage, devenu « une créature façonnée de plusieurs morceaux : de Marilyn, de Krystian et d[’elle]-même »[66]. Elle confie également dans cet entretien sa crainte de décevoir le public, fasciné par ce personnage. Cette crainte qui se manifeste de manière désespérée dans la vidéo projetée dans le cours du spectacle trouve une justification hyperbolique dans le tableau onirique final, qui offre le sacrifice de l’icône, sa dévoration par le feu.
Voulant déconstruire le mythe Marilyn Monroe, atteindre sa personnalité sous ses nombreux masques, Lupa multiplie les effets de mise en abyme de Marilyn à Grouchenka et de Sandra Korzeniak à Marilyn, mais aussi de Paula à lui-même et du projet d’adaptation d’Arthur Miller des Frères Karamazov à l’adaptation de ce même roman qu’il a créée vingt ans plus tôt. Ces effets d’emboîtement, de génération profonde d’un rôle à l’autre et d’un spectacle à l’autre, mis en évidence par une théâtralité discrètement mais constamment questionnée, en plus de tisser un dialogue dramaturgique extrêmement pointu, permettent de constituer Marilyn en personnage de théâtre grâce au fantasme d’un autre personnage qu’elle rêvait d’incarner sur scène. Bien loin de délaisser la littérature avec ce spectacle, Lupa s’en sert finalement comme d’un instrument pour sonder « l’âme de Marilyn »[67], convaincu que les rêves d’un individu en disent plus longs sur lui que sa vie elle-même.
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[1] Krystian Lupa, Persona. Le Corps de Simone, trad. Agnieszka Zgieb, L’Entretemps, coll. « Scénogramme », 2015, p. 203.
[2] Krystian Lupa, « Champ magnétique », entretien avec Gwénola David, Mouvement n°8, avril/juin 2000, p. 32.
[3] Cf. le texte de présentation de ce spectacle, reproduit dans Krystian Lupa, Persona. Factory 2 ; Marilyn ; Le corps de Simone, op. cit., p. 189.
[4] Il paraît éloquent que Lupa soit également fasciné par Brigitte Bardot, qu’il considère « l’archétype de la star glamour, un être irréel, l’objet d’adoration et le symbole de tout ce qui est insaisissable, qui n’a pas d’existence réelle » (Lukasz Maciejewski, « L’assassinat de Narcisse. Les inspirations cinématographiques de Krystian Lupa », in Agnieszka Zgieb (dir.), Krystian Lupa. Espaces, Théâtre/Public n°249, p. 51). Brigitte Bardot devient personnage dans l’une des dernières créations de Lupa, Capri, l’île des fugitifs (2019).
[5] Fragments, trad. Tiphaine Samoyault, éd. du Seuil, coll. « Fiction et cie », 2010.
[6] Trad. Emmanuelle Pingault, éd. J’ai lu, coll. « Littérature générale », 1999.
[7] Sur les autres sources mobilisées pendant la création du spectacle, cf. le texte de Marcin Zawada, « Peut-être que tout s’enregistre », in Krystian Lupa, Persona, op. cit., p. 297-301.
[8] Krystian Lupa, Persona, op. cit., p. 131.
[9] Spectacle créé le 10 septembre 1990 au Stary Teatr de Cracovie.
[10] Krystian Lupa, Persona, op. cit., p. 134.
[11] Ibid.
[12] Ibid., p. 145.
[13] Ibid., p. 137.
[14] Ibid., p. 163.
[15] Ibid., p. 136.
[16] Ibid., p. 142.
[17] Ibid.
[18] Ibid., p. 147.
[19] Ibid., p. 148.
[20] Ibid., p. 153.
[21] Ibid., p. 158.
[22] Ibid., p. 164.
[23] Ibid., p. 171.
[24] Ibid., p. 176.
[25] Ibid., p. 177-178.
[26] Ibid., p. 179.
[27] Ibid., p. 183.
[28] Ibid., p. 185.
[29] Ibid., p. 131.
[30] Christophe Triau qualifie ainsi la crise qu’explore le théâtre de Lupa : « crise suspendue, lancinante ; non pas tendue vers un climax, mais ouverte sur un glissement : un temps d’entre-deux, et donc de révélation, un temps de trouble où les contours se défont tout en n’en acquérant paradoxalement, dans leur incertitude, que plus de netteté : la densité d’un tremblé, d’un “bougé immobile” » (« L’art de la condensation », in Georges Banu (dir.) « La Scène polonaise. Rupture et découvertes », Alternatives théâtrales n°81, janvier 2004, p. 20).
[31] Krystian Lupa, Persona, op. cit., p. 131.
[32] Ibid., p. 140.
[33] Ibid.
[34] Ibid., p. 143.
[35] Ibid.
[36] Ibid., p. 144.
[37] Ibid., p. 147.
[38] Ibid.
[39] Ibid., p. 157.
[40] Ibid., p. 159.
[41] Ibid., p. 178.
[42] Ibid., p. 179.
[43] Ibid., p. 180.
[44] Ibid., p. 180.
[45] Ibid., p. 181.
[46] Ibid., p. 163.
[47] Ibid., p. 164.
[48] Christophe Triau, « La frontière et la mer », in Agnieszka Zgieb (dir.), Krystian Lupa. Espaces, op. cit., p. 125.
[49] Krystian Lupa, Persona, op. cit., p. 164.
[50] Ibid., p. 135.
[51] Ibid., p. 140-141.
[52] Ibid., p. 137.
[53] Ibid., p. 139.
[54] Ibid.
[55] Ibid.
[56] Ibid., p. 142.
[57] Ibid., p. 151.
[58] Krystian Lupa, Utopia. Lettre aux acteurs, trad. Erik Veaux, Actes Sud-Papiers, coll. « Le Temps du théâtre », 2016, p. 83-85.
[59] Krystian Lupa, Persona, op. cit., p. 176.
[60] Ibid., p. 177.
[61] Ibid.
[62] Ibid., p. 182.
[63] Ibid.
[64] Ibid.
[65] Sandra Korzeniak, « La rencontre avec Marilyn est une conversation avec soi-même », propos recueillis par Iga Dzieciuchowicz et traduits par Agnieszka Zgieb, reproduit in Krystian Lupa, Persona, op. cit., p. 307.
[66] Ibid.
[67] Dans le texte de présentation de sa trilogie Persona, Lupa écrit : « Face au deuxième volet du triptyque, intitulé Le Corps de Simone, j’aurais pu intituler aussi le premier volet L’Âme de Marilyn, ce qui aurait permis de mettre en évidence les deux pôles de notre espace personnel et d’exprimer les limites et les directions potentielles de la libération qui se retrouvent dans la structure de cet espace ancré dans la personnalité de l’homme aujourd’hui » (op. cit., p. 9).