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« Les Vagues » d’Élise Vigneron au Théâtre de Châtillon – entre glace et eau, le spectacle de l’écoulement du temps

Après Marie-Christine Soma il y a une douzaine d’années, ou, plus récemment, Pauline Bayle, de biais avec Écrire sa vie, c’est au tour d’Élise Vigneron de proposer une adaptation des Vagues, livre « le plus complexe et le plus difficile » de Virginia Woolf de l’aveu de l’autrice anglaise elle-même. L’approche s’annonce d’emblée singulière cette fois, car l’artiste a été formée aux arts plastiques, au cirque puis aux arts de la marionnette, dans lesquels elle se distingue ces dernières années. Elle promet avec ce spectacle une courte adaptation du roman, d’une heure seulement, pour cinq interprètes et cinq marionnettes de glace. Le travail extrêmement plastique qu’elle propose, mais aussi fondé, dramaturgiquement parlant, invite à une réflexion grave sur le temps qui passe – thème central des Vagues.
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« Après la répétition / Persona » d’Ivo van Hove au Théâtre de la Ville – Berling, Bercot, Bachelet… Bergman people

Après plusieurs années de travaux, le Théâtre de la Ville a rouvert en septembre dernier. Les photographies de la brochure en démontrent l’ampleur et contreviennent au sentiment de familiarité qui saisit le public de retour dans les lieux, alors que les changements sont discrets, dans le foyer comme en salle. Les fauteuils toujours beiges ne claquent plus cependant, il faudra donc aux habitués trouver un autre moyen de manifester leur mécontentement lorsqu’ils partiront ostensiblement au milieu du spectacle. La grande salle accueille en ce mois de novembre une reprise : il y a onze ans, Ivo van Hove créait un diptyque, After the Rehearsal / Persona, à partir de deux courts films d’Ingmar Bergman. À l’invitation d’Éric Bart, programmateur du Printemps des comédiens, le metteur en scène a recréé ce spectacle avec un équipe française au printemps dernier, reconduisant une pratique étrange qu’il avait initiée avec Vu du pont, qui substitue la création en plusieurs langues à la tournée. Ici, la recréation a beau survenir des années plus tard, la scénographie, les éléments de décor et la création sonore sont les mêmes qu’en 2012. Seules les personnes au plateau changent, et ce changement n’est pas mineur, car contrairement à ce que l’on pourrait attendre d’Ivo van Hove, qui s’est plusieurs fois distingué par des scénographies spectaculaires, ce spectacle repose entièrement sur leur performance. En confiant les rôles de Bergman à des personnes qu’il considère chevronnées, il fait l’économie d’une direction d’acteurs, ainsi que d’une véritable dramaturgie qui donnerait sens à sa démarche.
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« Toute nue » d’Émilie Anna Maillet à la Comédie de Caen – Feydeau caféiné et féministe

La Comédie de Caen a programmé pour deux dates une comédie, Toute nue. Variation Feydeau-Norén, conçue par Émilie Anna Maillet. Partant d’une pièce de Feydeau, Mais n’te promène donc pas toute nue !, la metteuse en scène y injecte des dialogues de Norén issus de plusieurs de ses pièces. Non pas sur le mode de la confrontation, mais au contraire de la diffusion, une diffusion au départ presque insensible mais qui en vient en sous-main à déplacer les rapports de force et à bouleverser les équilibres de la pièce initiale, jusqu’à lui donner une tout autre portée. Le terme de « variation » avancé dans le titre du spectacle annonce son caractère musical, rythmique, électrique presque, dimension qui contribue à offrir une lecture caféinée et féministe de Feydeau.
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« Quai ouest » de Koltès mis en scène par Ludovic Lagarde au Théâtre Nanterre-Amandiers – errances dramaturgiques

Ludovic Lagarde fait partie des rares metteurs en scène aujourd’hui qui montent des textes de théâtre – de Tchekhov, Brecht, Shakespeare, Sarah Kane, Büchner, Jelinek... et d’autres moins renommés qu’il contribue à faire connaître. Avec un tel répertoire, il paraissait inévitable qu’il en vienne à Koltès. Lagarde ne choisit pas l’une des plus connues de cet auteur, mais Quai ouest, qui n’a fait l’objet que d’une vingtaine de mises en scène en France depuis la création de Patrice Chéreau en 1986. C’est justement au même endroit, à Nanterre, qu’est programmé le spectacle, mais dans le bâtiment temporaire, en attendant la fin des travaux. Entouré de ses acteurs fétiches, Lagarde promet un beau spectacle. Le rendez-vous est cependant manqué, ce spectacle ne sera pas mémorable comme ont pu l’être L’Avare ou la trilogie Büchner. À défaut d’être embarqué, on aura pensé à tout ce que pourrait ou devrait être une mise en scène de ce texte.
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« Nous pour un moment » d’Arne Lygre, mis en scène par Stéphane Braunschweig – fugue sur la fragilité des liens entre les hommes

Avec Nous pour un moment, Stéphane Braunschweig poursuit son compagnonnage avec l’auteur norvégien Arne Lygre, qu’il a initié en 2011 avec Je disparais, du temps de sa direction de la Colline. Avant de monter cette pièce, Braunschweig l’a co-traduite avec Astrid Schenka, s’immergeant ainsi profondément dans sa langue et sa structure. Une fois metteur en scène et scénographe, il en déploie la dramaturgie complexe, semblable à une fugue dont le thème poursuivi est celui de l’insurmontable solitude des êtres.
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« Lampedusa Beach » de Lina Prosa, mis en scène par Eleonora Romeo – Odyssée sous-marine

Au Théâtre des Carmes, Eleonora Romeo présente une mise en scène du texte de Lina Prosa, Lampedusa Beach, premier volet de la Trilogie du naufrage. En marge du Off d’Avignon, de ses injonctions commerciales et du souci de plaire qui règne en maître, le choix de monter ce texte qui soulève la question toujours cruellement actuelle de l’immigration de milliers de personnes par la mer chaque mois s’affirme comme un parti pris artistique et politique fort.
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« The Hidden Force » d’Ivo van Hove à la Villette – dissolution des frontières

Dans le cadre du Festival 100% qu’organise la Villette, qui réunit plusieurs disciplines, sont invités les metteurs en scène belges Jan Lauwers et Ivo van Hove. Ce dernier présente un autre volet de sa trilogie autour des œuvres de Louis Couperus, auteur néerlandais méconnu au-delà des frontières de son pays : après Les Choses qui passent, présenté à Avignon l’année dernière, le public français découvre désormais The Hidden Force. Pour ce spectacle, Ivo Van Hove s’inspire d’un roman qui porte sur l’histoire coloniale des Pays-Bas, centré sur la figure du Résident. Comme le Consul de Malcolm Lowry dans Au-dessous du volcan, ou le directeur de comptoir Kurtz d’Au cœur des ténèbresde Conrad, ce personnage incarne le choc de deux civilisations et la nécessaire dissolution de l’une dans l’autre – mais pas celle que l’on croit. Pour figurer les contradictions d’Otto van Oudjick, Ivo van Hove entraîne au cœur de la jungle indonésienne, où se déchaînent les éléments et s’évanouissent les repères.
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« Jacuzzi » de Yunior García Aguilera – immersion dans le bain de la jeunesse cubaine

Dans le cadre des journées Traspasos Escénicos, organisées par l’Université des Arts de La Havane (ISA), en plus des conférences et ateliers qui rythment les journées, une série de spectacle est proposée chaque soir dans la capitale. L’arrivée d’étudiants en théâtre – futurs comédiens, metteurs en scène, scénographes, chercheurs ou critiques – des quatre coins du pays crée une émulation qui anime ces derniers jours de juin avant la trêve estivale.…

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« Petit Eyolf » d’Ibsen au Théâtre des Abbesses – l’envers du drame

Pour la première fois au cours de sa carrière, Julie Berès se confronte à un texte classique, indique le programme du Théâtre de la Ville. Dans son dernier spectacle présenté aux Abbesses, elle s’empare en effet d’une pièce d’Ibsen, Petit Eyolf, l’avant-dernière de l’auteur norvégien, qui n’est pas la plus connue et qui relativise cet adjectif, « classique ».…

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