Étiquette : personnages

« The Confessions » d’Alexander Zeldin au Théâtre de l’Odéon – entre Courbet et Hopper, hésitation esthétique pour un récit féministe

Alexander Zeldin, artiste britannique associé au Théâtre de l’Odéon, a été découvert en France ces dernières années avec plusieurs spectacles, parmi lesquels Une mort dans la famille et LOVE. Pour sa dernière création, The Confessions, présentée en juin dernier au Wiener Festwochen puis au Festival d’Avignon, il signe à nouveau le texte et la mise en scène. Le metteur en scène se risque cependant à un déplacement, par rapport à ses précédentes œuvres, caractérisées par une esthétique naturaliste digne d’André Antoine, grâce à laquelle il représentait des pans de la réalité contemporaine trop peu visibilisés : la transition délicate d’une personne âgée de chez elle à un EHPAD, ou la vie dans un hébergement d’urgence pour personnes expulsées. Avec The Confessions, Zeldin délaisse aussi bien le choix d’une représentation plus vraie que nature au plateau que la dimension sociale de son théâtre. Il procède à un changement d’échelle et offre le récit de vie d’une femme, et avec lui, le récit féministe d’une émancipation.
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« Neandertal » de David Geselson à l’Autre Scène du Grand Avignon – quête sur l’humain, des origines au présent du plateau

David Geselson est acteur depuis un vingtaine d’années, à l’écran et à la scène, et metteur en scène depuis une dizaine. Après de petites formes, à un ou deux au plateau, il gagne en ampleur avec Le Silence et la Peur. Avignon lui offre des moyens plus importants encore pour sa dernière création, Neandertal. Le changement d’échelle que permet le festival ne réussit pas toujours aux artistes, mais l’art de Geselson paraît au contraire s’épanouir. Avec six acteurs et actrices au plateau, un musicien, une dessinatrice et une scénographie transformable qui transporte d’un lieu à l’autre, il offre une fresque épique en forme de quête des origines, qui fonctionne pleinement grâce à sa grande maîtrise dramaturgique, dans l’écriture et sur scène, et sa direction d’acteur très fine.
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« Guermantes » de Christophe Honoré – se consoler du présent en rêvant la vie d’artiste

En avril 2020, Christophe Honoré devait présenter sa dernière création avec la troupe de la Comédie-Française : Le Côté de Guermantes, d’après Marcel Proust. Reportée, la pièce est finalement créée en septembre, et elle reste à l’affiche pendant plusieurs semaines, ne cessant de s’adapter aux nouvelles mesures sanitaires : la distanciation, les jauges réduites, le couvre-feu, etc. Les multiples rebondissements qui ont marqué la création de ce spectacle ont inspiré un film au metteur en scène, qui est aussi réalisateur. De l’abattement que provoquent les reports et annulations successives, émerge une idée, un projet, qui permet de parler de la situation présente et d’échapper à sa pesanteur : un film sur la troupe de la Comédie-Française pendant les répétitions d’un spectacle d’après Proust, quand les acteurs et le metteur en scène apprennent que la première n’aura pas lieu. Alors qu’une impression d’anachronisme se dégageait du spectacle en réalité créé, le film ramène à notre époque et nous console avec des fantasmes.
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« Dostoïevski, poète tragique », Stefan Zweig

Ses romans sont en quelque sorte des drames voilés, transformés ; en dernière analyse les Frères Karamazov représentent l’esprit même de la tragédie grecque, sont la chair de la chair de Shakespeare. Le colosse y est nu, sans défense et petit sous le ciel tragique de la destinée. Dans ces instants de crises et de chutes le ton narratif des œuvres de Dostoïevski disparaît. L’ardeur des sentiments fait fondre leur légère enveloppe épique ; elle s’évapore, il ne reste plus rien que le dialogue à la véhémente ardeur. Les grandes scènes de ses romans sont de purs dialogues dramatiques. Chaque personnage y est si bien charpenté, l’ample flot du récit se cristallise aux instants critiques à tel point que l’on peut les transporter sur la scène sans changer un mot. Le sens du tragique qui pousse Dostoïevski vers l’acte définitif, vers la tension violente, vers la catastrophe foudroyante, transforme alors ses chefs-d’œuvre épiques en chefs-d’œuvre dramatiques.
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« La Condition humaine » de Malraux – humain, pas assez humain

« Les mêmes chemins qui mènent l’individu au crime mènent la société à la révolution ». Telle était la thèse développée par Dostoïevski dans son roman les Démons selon le critique Berdaiev. La formule resurgit à l'esprit quand on lit La Condition humaine d’André Malraux. Dans cette œuvre, qui lui vaut de recevoir le Prix Goncourt l’année de sa publication, Malraux relate un épisode de la révolution chinoise, l’insurrection communiste de Shanghai, en 1927. Variant les points de vue, d’un personnage à l’autre, Malraux joue également avec les échelles. Dans cette œuvre, il fait coexister celle de l’individu, celle de la société, celle d’un pays ou encore celle du mouvement communiste de la Russie à la Chine – qui réduit l’homme à néant en le perdant de vue.
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« Confesiones » par le Grupo Yuyachkani – « My Life in Art »

Parmi tous les événements qui animent La Havane en ce mois de mai – le Festival du film français, le mois de la culture française, la biennale du design… – figure aussi le Mayo Teatral. Pour sa huitième édition depuis 2001, ce festival de théâtres d’Amérique latine et des Caraïbes met à l’honneur le « Grupo », la compagnie, le collectif, mode de création et de production majeur de cette région du monde.…

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« Le Dounier Rousseau, l’innocence archaïque » à Orsay : jusqu’au coeur de la jungle

Avec Le Douanier Rousseau, l’innocence archaïque, Orsay ne faillit pas à sa réputation et offre un nouveau voyage dans l’histoire de la peinture. L’espace dédié aux expositions temporaires dans le musée s’est encore métamorphosé, pour assurer cette fois une immersion physique dans l’univers du peintre, enrichie de textes qui libèrent l’imagination et l’interprétation personnelle. …

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Notes et contre-notes sur « Jacques ou la Soumission » (1/3)

« L’explication linéaire est une lecture en haute tension et
en profondeur, qui développe l’aptitude à la jouissance ».

C’est la phrase que nous avait dite un professeur génial, qui avait trouvé le moyen de donner tout son sens à un exercice que l’on nous avait empêché de faire toute notre scolarité malgré l’intuition et le désir qui nous y portaient.…

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« Edward Hopper » au Grand Palais : le silence d’Hopper

La rétrospective consacrée à Edward Hopper ne ménage pas son public. Victime de son succès, elle lui impose des heures de queue quels que soient le moment de la journée ou le jour de la semaine. Une fois entré dans le saint des saints, il faut encore s’armer de patience avant de découvrir les chefs-d’œuvre que les belles affiches de l’exposition ont laissé entrevoir.…

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« Cercles / Fictions » de Joël Pommerat aux Ateliers Berthier

Joël Pommerat revient à l’Odéon et nous présente Cercles / Fictions, créé en janvier 2010 au Théâtre des Bouffes du Nord. La salle des Ateliers Berthier s’est métamorphosée à son arrivée, pour former le cercle dont il est question dès le titre : le public entoure la scène, semblable à une piste de cirque, sur laquelle vont se croiser de multiples destins.…

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