Étiquette : morale

« L’Enfant brûlé » de Stig Dagerman – passions du deuil

L’Enfant brûlé est l’un des quatre romans de l’auteur suédois Stig Dagerman, dont l’œuvre la plus connue est un essai sur le suicide qui précède de deux ans celui de l’auteur à 31 ans : « Notre besoin de consolation est impossible à rassasier ». L’Enfant brûlé peut se lire comme une illustration de ce titre poignant, en ce qu’il relate le difficile travail de deuil d’un jeune homme après le décès de sa mère, et les relations conflictuelles que cette situation engendre avec son père, avec sa fiancée, et avec la nouvelle amante de son père. Son besoin de consolation incommensurable, Bengt l’assouvit par la haine, la sournoiserie, la passion et la pensée du suicide. Tout au long d’une année, sont ainsi disséquées les étapes du deuil d’un jeune garçon en pleine formation morale et émotionnelle.
Lire la suite

« Némésis » de Tiphaine Raffier aux Ateliers Berthier – l’air vicié de notre temps

Tiphaine Raffier présente aux Ateliers Berthier l’adaptation d’un roman de Philip Roth, Némésis. La metteuse en scène, qui jusqu’ici montait ses propres textes, a cette fois choisi de s’emparer du dernier roman de l’auteur américain Philip Roth, écrit en 2010. Celui-ci n’a a priori rien à voir avec le théâtre, mais il a quelque part beaucoup à voir avec le précédent spectacle de Tiphaine Raffier. Dans le sillage de La Réponse des hommes, la metteuse en scène soulève en effet des questions d’ordre moral sur scène et parvient avec elles à saisir quelque chose d’impalpable qui paraît caractéristique de notre époque, un air du temps dans ce qu’il a de plus volatile.
Lire la suite

« Shakespeare notre contemporain » de Jan Kott – [extrait] « Hamlet est comme une éponge »

Tous les problèmes que Shakespeare porte à la scène, toutes les questions qu’il pose s’adressent à nous – aujourd’hui. Hamlet, Lear, Richard III n’appartiennent pas qu’au passé. Othello, Desdémone ne sont ni des imageries romantiques ni des créations abstraites : leurs actes éclairent notre destin et nos actes, leur sort nous concerne directement, leur violence est la nôtre, celle de notre temps.
Lire la suite

« La Réponse des hommes » de Tiphaine Raffier aux Amandiers – « Nous sommes désolés »

Après de multiples rebondissements dus au covid, Tiphaine Raffier présente enfin sa dernière création en région parisienne, au Théâtre Nanterre-Amandiers, en coréalisation avec le Théâtre de l’Odéon. Le titre est aussi mystérieux qu’attirant : « la réponse des hommes ». Réponse à quelle question ? En réalité, il n’y en pas une, clairement formulée, mais d’innombrables, à de multiples échelles, dont le dénominateur commun est la miséricorde, définie comme la compassion pour la misère d’autrui, la générosité qui entraîne le pardon, et qui est aussi le nom donné à la bonté infinie de Dieu dans la tradition judéo-chrétienne. Un titre aux consonances bibliques pour un spectacle au thème biblique sous-titré : « Variations autour de neuf œuvres de miséricorde ». Depuis Adam et Ève, on sait que l’homme n’est pas à la hauteur des ambitions que Dieu a pour lui. Sans suspens, les réponses des hommes, incapables d’être bons, ni même miséricordieux, sont dramatiquement décevantes. Mais plus que cette conclusion qui n’est pas surprenante, ce spectacle donne à voir un monde apocalyptique – le nôtre – dans lequel les sirènes sonnent sans relâche, sans que les humains paraissent réagir.
Lire la suite

« La Porte étroite » de Gide – la fiction comme champ d’exploration de la morale

Après Les Nourritures terrestres et L’Immoraliste, Gide publie en 1909 un nouveau récit, La Porte étroite, qui peut se lire comme un contrepoint des deux précédents. L’œuvre déploie en effet une même matière autobiographique, son mariage avec sa cousine Madeleine Rondeaux, et met en jeu à partir de là une autre morale, symétriquement inverse, mais tout aussi extrême.…

Lire la suite

« L’Immoraliste » d’André Gide – conversion ou déchirement

Après avoir rencontré un certain succès avec les Nourritures terrestres en 1897, Gide reprend quelques années plus tard la même période de sa vie pour s’inspirer de son nouveau roman, L’Immoraliste. Les événements à peine perceptibles en filigrane dans son œuvre-poème sont ici ramenés au premier plan, et l’éthique louée sur le mode de l’incantation persuasive est désormais présentée au travers d’une découverte par l’expérience.…

Lire la suite