Étiquette : théâtralité

Présences de Dostoïevski dans « Onzième » de François Tanguy : le resurgissement du théâtre sur la scène du Radeau par le biais du roman

Alors que le Théâtre du Radeau a constamment questionné les notions de fable, d’intrigue et de personnages dans ces premières créations, Onzième (2011) apparaît comme une étape décisive dans la reconquête de la parole et de la théâtralité engagée par la compagnie depuis la fin des années 1990. Ce spectacle soulève en effet la question de l’adaptation romanesque par la place qu’il accorde à deux romans de Dostoïevski, Les Démons et Les Frères Karamazov. La présence de ces deux œuvres paraît d’autant plus insistante que les cinq dialogues qui en sont extraits sont paradoxalement identifiés par le public comme des moments théâtraux. Pour envisager la façon dont la théâtralité resurgit sur la scène du Radeau par le biais du roman, cet article se propose de revenir sur la genèse du spectacle, sur les processus d’adaptation du matériau romanesque et sur l’inscription du texte dans une vaste écriture de plateau fondée sur les notions de citation et de montage.
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« The Confessions » d’Alexander Zeldin au Théâtre de l’Odéon – entre Courbet et Hopper, hésitation esthétique pour un récit féministe

Alexander Zeldin, artiste britannique associé au Théâtre de l’Odéon, a été découvert en France ces dernières années avec plusieurs spectacles, parmi lesquels Une mort dans la famille et LOVE. Pour sa dernière création, The Confessions, présentée en juin dernier au Wiener Festwochen puis au Festival d’Avignon, il signe à nouveau le texte et la mise en scène. Le metteur en scène se risque cependant à un déplacement, par rapport à ses précédentes œuvres, caractérisées par une esthétique naturaliste digne d’André Antoine, grâce à laquelle il représentait des pans de la réalité contemporaine trop peu visibilisés : la transition délicate d’une personne âgée de chez elle à un EHPAD, ou la vie dans un hébergement d’urgence pour personnes expulsées. Avec The Confessions, Zeldin délaisse aussi bien le choix d’une représentation plus vraie que nature au plateau que la dimension sociale de son théâtre. Il procède à un changement d’échelle et offre le récit de vie d’une femme, et avec lui, le récit féministe d’une émancipation.
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« Baldwin and Buckley at Cambridge » de la compagnie Elevator Repair Service au Gymnase du Lycée Mistral – « Il faut accepter notre histoire »

À côté des spectacles-fleuves de quatre, cinq ou huit heures, le Festival d’Avignon programme une courte forme avec Baldwin and Buckley at Cambridge, de la compagnie new-yorkaise Elevator Repair Service. Le spectacle, parfois joué deux fois par jour, dure une heure, et propose un dispositif scénographique extrêmement simple pour rejouer la confrontation de James Baldwin et William F. Buckley, invités en 1965 à l’Université de Cambridge à débattre autour du sujet suivant : « Le rêve américain n’existe-t-il qu’aux dépens du Noir américain ? ». Rejouer, reperformer, refaire entendre ce débat dont est repris presque chaque mot… toute la question réside précisément dans le verbe choisi.
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« 1983 » d’Alice Carré et Margaux Eskenazi au Théâtre des Abbesses – transmettre pour avancer

Après Et le cœur fume encore en 2020, qui portait sur la guerre d’Algérie et ouvrait sur ses conséquences au long cours, la compagnie Nova reprend le fil de sa réflexion et dresse une fresque de la France de 1979 à 1985, dont le point d’orgue est l’année 1983, année d’une Marche pour l’égalité et contre le racisme qui mène de Marseille à Paris. Depuis deux ans, le travail de la compagnie a profondément mûri. La part documentaire toujours importante de son travail, qui nourrit densément la réflexion, est cette fois assortie d’une plus grande conscience des moyens théâtraux qui permettent de la mettre en valeur. Alice Carré et Margaux Eskenazi proposent ainsi un objet composite, qui sollicite la réflexion, fait frissonner d’effroi ou d’émotion, et fait encore rire. Plus profondément, 1983 se charge de transmettre pour ne pas qu’on reparte de zéro, que les combats qu’il est nécessaire de mener aujourd’hui s’inscrivent dans une histoire capable de leur donner poids et ampleur.
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« Fraternité, conte fantastique » de Caroline Guiela Nguyen aux Ateliers Berthier – théâtre de larmes sans catharsis

Dans la continuité de Saïgon, qu’un des personnages introduisait comme une « histoire de larmes », le dernier spectacle de Caroline Guiela Nguyen, Fraternité, conte fantastique, propose à nouveau un théâtre de larmes. La metteuse en scène propose cette fois un conte dans lequel la moitié de l’humanité a disparu, et ceux qui ont survécu dépensent toute leur énergie à se consoler les uns les autres. La catastrophe imaginée fait écho aux temps que nous vivons, mais l’émotion ne naît pas de cette possible résonance avec le réel. Le décalage est encore plus net que dans Saïgon, entre un projet théâtral fort, lourd de convictions, et un spectacle qui n’en livre que des bribes.
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« Les Fils de la terre » mis en scène par Elise Noiraud au Théâtre des Lucioles – la réalité des campagnes sur scène

Dans Les Fils de la terre, Élise Noiraud à adapté au théâtre le documentaire du même titre d’Edouard Bergeon. Ce fils et petit-fils d’agriculteur devenu journaliste a pris la caméra pour rendre compte de la tragédie des paysans aujourd’hui, qui, croulant sous les dettes et subissant la pression de la concurrence internationale, en viennent pour beaucoup à mettre fin à leurs jours.

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Projet de thèse : « Du roman adapté au roman inadaptable : l’adaptation théâtrale des romans de Dostoïevski de Jacques Copeau à Vincent Macaigne (1911-2014) »

Projet de thèse, menée sous la codirection d’Anne-Françoise Benhamou (ENS)
et Sophie Lucet (Paris-Diderot)

Du roman adapté au roman inadaptable :
l’adaptation théâtrale des romans de Dostoïevski
de Jacques Copeau à Vincent Macaigne (1911-2014)

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