« Et le coeur fume encore » de Margaux Eskenazi et Alice Carré au TGP – le présent depuis l’Histoire, l’Histoire depuis l’intime
La compagnie Nova, qui a commencé il y a quelques années avec des mises en scène d’œuvre classiques (Hernani, Richard III), présente au TGP sa dernière création, Et le cœur fume encore, spectacle présenté et remarqué dans le Off du Festival d’Avignon 2019. Il s’agit du deuxième volet d’un diptyque intitulé « Ecrire en pays dominé », amorcé en 2016 avec Nous sommes de ceux qui disent non à l’ombre. Dans ces deux opus, la compagnie garde un lien fort avec la littérature, mais ses membres la mobilisent cette fois pour aborder certains pans de la réalité contemporaine française, que leur suggère leur expérience intime. Après avoir réfléchi au métissage des langues dont ils ont hérité, imprégnés de textes d’Aimé Césaire, Senghor et d’autres, ils s’attaquent dans Et le cœur fume encore à la mémoire de la guerre d’Algérie. Outre leurs histoires personnelles, l’impulsion leur est donnée par Kateb Yacine, grand auteur de la décolonisation, à qui ils empruntent un vers pour le titre de leur spectacle. Un vaste travail de collecte d’archives et de témoignages recueillis auprès de leurs proches, mené par Margaux Eskenazi et Alice Carré, leur a permis de reconstituer certains épisodes de la guerre d’indépendance algérienne, et de tisser une réflexion sur ses formes de permanences dans la société actuelle.« Place » de Tamara Al Saadi au T2G – art-thérapie pour schizophrénie avérée
Pour quelques dates seulement, est repris au T2G un spectacle présenté l’an dernier au Festival Impatience, consacré au théâtre émergent, récompensé du prix du jury et de celui des lycéen.ne.s. Il s’agit de Place de Tamara Al Saadi, qui s’interroge sur celle que les « étrangers » cherchent à occuper dans notre société française. Le terme entre guillemets désigne des individus issus d’immigrations plus ou moins récentes, profondément déchirés entre leurs racines familiales et le monde dans lequel ils essaient de se fondre. La jeune metteuse en scène aborde cette question profondément actuelle depuis une perspective intime qui ne peut que toucher, et crée à partir d’elle un spectacle aux multiples qualités.« SAIGON » de Caroline Guiela Nguyen aux Ateliers Berthier – histoires de larmes et non de langues
Aux Ateliers Berthier est en ce moment repris SAIGON, spectacle créé il y a maintenant deux ans à Valence, programmé à Avignon l’été dernier, et depuis en tournée dans tout le pays et même au-delà des frontières françaises. Le voyage sied à ce spectacle hybride, qui unit la France et le Vietnam, dans sa conception comme dans sa réalisation. Il est l’œuvre de Caroline Guiela Nguyen, autrice et metteuse en scène, et avant cela, fille de Vietkieu, ou Vietnamien de l’étranger, qui a rassemblé autour d’elle des acteurs des deux nationalités – des Français, des Vietnamiens, et d’autres Français d’origine vietnamiennes – après des résidences à Hô-Chi-Minh Ville. Tous sont réunis pour sonder l’histoire intime et modeste d’émigrés vietnamiens, entre 1956 et 1996.« Jusque dans vos bras » des Chiens de Navarre aux Bouffes du Nord – le rire contre les larmes
Depuis Quand je pense qu’on va vieillir ensemble en 2013 et les Armoires normandes en 2015, qui sondaient respectivement nos névroses et notre rapport à l’amour, le collectif les Chiens de Navarre ont pris le temps de travailler à leur nouveau spectacle, Jusque dans vos bras, créé en juin 2017 à Lyon. Se faisant cette fois la caisse de résonance de l’actualité, particulièrement vive et suivie pendant la campagne présidentielle, ils entreprennent ici d’interroger le concept d’identité française. Pour traiter ce thème pour le moins problématique, de grandes figures de l’histoire nationale sont invoquées avec humour et provocation, et des réalités délicates sont évoquées selon une approche très peu politiquement correcte. Ces détours permettent de penser l’impensé ou l’impensable, d’apprivoiser des idées lointaines ou étrangères, et d’élaborer des scénarios utopiques. Mais ces exercices de gymnastique intellectuelle ne sont jamais à prendre tout à fait au sérieux, et ce qui domine, avant toute chose, c’est le plaisir de la dérision et du jeu.« L’Immoraliste » d’André Gide – conversion ou déchirement
Après avoir rencontré un certain succès avec les Nourritures terrestres en 1897, Gide reprend quelques années plus tard la même période de sa vie pour s’inspirer de son nouveau roman, L’Immoraliste. Les événements à peine perceptibles en filigrane dans son œuvre-poème sont ici ramenés au premier plan, et l’éthique louée sur le mode de l’incantation persuasive est désormais présentée au travers d’une découverte par l’expérience.…
« Le Capital et son Singe » de Sylvain Creuzevault à la Colline
Après Le Père Tralalère et Notre Terreur, Sylvain Creuzevault revient à la Colline avec un nouveau spectacle dans le cadre du Festival d’Automne, Le Capital et son singe. Du premier au deuxième, on passait de la sphère familiale à la sphère historique avec une réflexion sur les conséquences de la Révolution Française.…