Étiquette : horreur

« Makbeth » du Munstrum Théâtre à la Comédie de Reims – cauchemar horrifique

La grande salle de la Comédie de Reims est comble jusqu’au deuxième balcon pour Makbeth du Munstrum Théâtre, une compagnie à l’esthétique extrêmement singulière entre autres caractérisée par des ambiances crépusculaires et par l’usage de masques et de prothèses qui déforment les corps humains. Après des textes de Copi et de Mayenburg, Louis Arene et Lionel Lingelser, à la tête du Munstrum, s’attaquent cette fois à une tragédie de Shakespeare, la plus sombre. Mais ils annoncent d’emblée une adaptation en remplaçant le « c » par un « k » et en indiquant « d’après ». Ces indices congédient la lettre du texte, mais aussi un geste de mise en scène qui serait fondé sur une dramaturgie chargée de déplier les strates de l’œuvre pour en offrir une relecture. Le Munstrum livre une interprétation visuelle et plastique de la pièce, qui donne naissance à des images aussi spectaculaires que cauchemardesques.
Lire la suite

« Beloved » de Toni Morrison – l’enfantôme, figuration de la hantise du passé esclavagiste des États-Unis

L’écrivaine afro-américaine Toni Morrison, décédée il y a trois ans, a acquis la pleine reconnaissance littéraire avec Beloved, roman publié en 1987 et récompensé l’année suivante par le Prix Pulitzer. Peu après, en 1993, Toni Morrison a reçu le Prix Nobel de littérature, pour « ses romans caractérisés par une force visionnaire et une portée poétique, qui donne vie à un aspect essentiel de la réalité américaine ». La réalité américaine que Beloved découvre, c’est celle l’Amérique esclave, de la veille de la guerre de Sécession à l’abolition de l’esclavage, saisie à partir d’une poignée de personnages noirs qui portent plusieurs vies en eux et sont hantés par le passé une fois affranchis. L’écriture imite le mouvement de la mémoire traumatique, qui tout à la fois refoule et ressasse, tourne autour des drames qu’elle laisse entrevoir, et tisse toute une poétique à partir de détails cristallisants qui prennent progressivement sens – jusqu’au moment de confronter pleinement à l’inconcevable.
Lire la suite

« Je vole… et le reste je le dirai aux ombres » de Jean-Christophe Dollé – approcher le mystère d’un fait divers avec le théâtre

Dans Mangez-le si vous voulez déjà, Jean-Christophe Dollé se servait du théâtre pour questionner l’horreur, le moment à la fois précis et indéchiffrable de bascule où le quotidien vire au drame, où le bon sens s’éloigne et laisse place à la folie meurtrière. D’un village du Périgord au XIXe siècle, il passe dans Je vole... et le reste je le dirai aux ombres au Paris du XXIe siècle, de la folie d’un village tout entier à la détresse d’un seul homme, de toute une après-midi à une seule seconde – celle qui précède le moment où Richard choisit de se jeter par la fenêtre et de se servir de son pouvoir secret, celui de voler, pour quelques instants au moins.
Lire la suite

« Fin de l’histoire » d’après Witold Gombrowicz à la Colline : monceaux d’histoires et d’Histoire

Trois ans après Nouveau Roman, Christophe Honoré revient à la Colline pour présenter Fin de l’histoire. Des écritures de Duras, Simon, Sarraute, Mauriac, Butor ou Robbe-Grillet, il passe à la pensée de Gombrowicz, sans autre transition que celle du temps et de tout ce qui le transforme en durée.…

Lire la suite

« Ce ne andiamo per non darvi altre preoccupazioni » et « Reality » de Daria Deflorian et Antonio Tagliarini à la Colline : diptyque

Dans le cadre du Festival d’Automne, les Italiens Daria Deflorian et Antonio Tagliarini présentent à la Colline deux spectacles, Ce ne andiamo per non darvi altre preoccupazioni et Reality. En plus d’être le fruit de la collaboration des deux artistes, metteurs en scène et comédiens pour ces créations, de se partager le même cahier-programme, leur esthétique est commune, mise au service d’une réflexion sur le rapport du théâtre au réel, sa capacité à le représenter et à l’interroger. De l’un à l’autre, pourtant, les enjeux ne sont pas tout à fait les mêmes, et par conséquent leurs effets, la perception que l’on peut en avoir.
Lire la suite