Catégorie : Travaux

Sous le masque : déconstruire le mythe Marilyn Monroe par le rêve du théâtre

Cet article propose une analyse dramaturgique du spectacle Persona. Marilyn créé par Krystian Lupa en avril 2009, et s’attache à montrer que pour sonder la personnalité scindée de la star, le metteur en scène polonais accorde une place déterminante à un projet de théâtre qu’avait authentiquement Marilyn Monroe : interpréter le rôle de Grouchenka dans une adaptation des Frères Karamazov qu’avait envisagée son dernier mari, Arthur Miller. Le vertige du dialogue dramaturgique établi entre l’icône de la culture américaine des années 1960 et l’un des personnages emblématiques de la littérature russe est décuplé par le souvenir de l’adaptation que Lupa a lui-même faite du roman de Dostoïevski en 1990, par le personnage de Paula Strasberg dans la pièce, double déformé voire dégradé du metteur en scène, et par le travail d’appropriation de Marilyn par l’actrice Sandra Korzeniak.
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« Tubes. La philosophie dans le juke-box », Peter Szendy [extraits] – la bande-son de nos vie

"Vous avez tous, comme moi, j'en suis sûr, été hantés, obsédés jusqu'à la nausée, possédés jusqu'à n'en plus pouvoir par un de ces airs comme ça, une de ces chansons que l'on entend par hasard, c'est-à-dire par nécessité, à la radio, au café, au supermarché : un de ces tubes, qui dès lors ne nous lâchent plus, qui sont là sur nos lèvres au réveil, qui rythment nos pas lorsque nous marchons dans la rue ou qui viennent soudain perturber, sans que l'on sache pourquoi, une chaîne de pensées, des rêveries dans notre for intérieur. On peut les aimer ou les haïr : on peut les réentendre bien des années après et être happés par un flot d'émotion nostalgique qui nous emporte vers le passé comme si on y était ; on peut au contraire tenter de se défendre de toutes ses forces contre ce parasite musical qui se permet de se saisir de nous. Rien n'y fait, il y a là une sorte de virus qui nous gagne : ce que certains appellent des vers d'oreille."
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Jean Genet au sujet des « Frères Karamazov » – l’allégresse de Dostoïevski

Les chefs-d’œuvre artistiques ou poétiques sont la plus haute forme de  l’esprit humain, son expression la plus convaincante : voilà un lieu commun qu’on se doit de conserver sous le titre de vérité éternelle. Qu’ils soient la plus haute forme de l’esprit humain, ou la forme la plus haute donnée à l’esprit humain, ou la plus haute forme prise, patiemment ou vite, par un coup de pot, toujours hardiment si l’on veut, il s’agit d’une forme, et cette forme est loin d’être la limite où peut s’aventurer un homme. Passons à Dostoïevski ou plutôt aux Frères Karamazov, chef-d’œuvre du roman, grand livre, audacieuse instigation des âmes, démesure et démesures.
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Distributions de rêve – « Les Frères Karamazov »

Au terme de six années à travailler sur les adaptations des romans de Dostoïevski au théâtre, se prendre à rêver la distribution idéale des Frères Karamazov à partir de toutes celles qu’ont inspiré cette œuvre depuis le début du XXe siècle, de Jacques Copeau à Jean Bellorini, de Krystian Lupa à Sylvain Creuzevault – avec l’espoir que de nouvelles adaptations viennent combler les manques.
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Distributions de rêve – « L’Idiot »

Au terme de six années à travailler sur les adaptations des romans de Dostoïevski au théâtre, se prendre à rêver la distribution idéale de L'Idiot à partir de celles qu’ont inspiré cette œuvre depuis le début du XXe siècle, celle de Vincent Macaigne au premier chef, mais pas uniquement – avec l’espoir que de nouvelles adaptations viennent combler les manques.
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Distributions de rêve – « Les Démons »

Au terme de six années à travailler sur les adaptations des romans de Dostoïevski au théâtre, se prendre à rêver la distribution idéale des Démons à partir de toutes celles qu'ont inspiré cette œuvre depuis le début du XXe siècle, d'Albert Camus à Sylvain Creuzevault, de Frank Castorf à Guy Cassiers - avec l'espoir que de nouvelles adaptations viennent combler les manques.
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« Du roman adapté au roman inadaptable : Dostoïevski sur la scène théâtrale française moderne et contemporaine » : fin de la thèse

Dostoïevski est l’auteur le plus adapté sur la scène française moderne et contemporaine, depuis la fin du XIXe siècle jusqu’à nos jours. Dès le moment de la découverte de ses œuvres en France, ses romans attirent le théâtre, qui en livre des adaptations. Tout au long du XXe siècle, les termes de cette appropriation de la littérature par la scène changent – selon l’évolution de la réception des œuvres de Dostoïevski en France, selon les grandes mutations que connaît l’art théâtral pendant cette période, et selon le renouvellement constant de la pratique de l’adaptation. La prise en compte de ces multiples paramètres révèle le pouvoir magnétique que les romans de Dostoïevski exercent sur le théâtre : ils l’attirent autant qu’ils lui résistent.
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« Dostoïevski, poète tragique », Stefan Zweig

Ses romans sont en quelque sorte des drames voilés, transformés ; en dernière analyse les Frères Karamazov représentent l’esprit même de la tragédie grecque, sont la chair de la chair de Shakespeare. Le colosse y est nu, sans défense et petit sous le ciel tragique de la destinée. Dans ces instants de crises et de chutes le ton narratif des œuvres de Dostoïevski disparaît. L’ardeur des sentiments fait fondre leur légère enveloppe épique ; elle s’évapore, il ne reste plus rien que le dialogue à la véhémente ardeur. Les grandes scènes de ses romans sont de purs dialogues dramatiques. Chaque personnage y est si bien charpenté, l’ample flot du récit se cristallise aux instants critiques à tel point que l’on peut les transporter sur la scène sans changer un mot. Le sens du tragique qui pousse Dostoïevski vers l’acte définitif, vers la tension violente, vers la catastrophe foudroyante, transforme alors ses chefs-d’œuvre épiques en chefs-d’œuvre dramatiques.
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« Dix millions » de Carlos Celdrán, traduit de l’espagnol (Cuba)

Dans 10 millones, Carlos Celdrán retrace le parcours de l’enfant qu’il a été, mais peut-être plus encore celui de ses parents. Leur histoire est celle de toute une génération, celle qui a connu la Révolution cubaine et qui s’est déchirée en deux camps : les partisans d’une part, pris d’une nouvelle passion politique et d’un espoir sans limite – telle la mère de Celdrán –, et les sceptiques, qui ont préféré renoncer à un idéal qui paraissait trop beau pour être vrai pour se consacrer à une vie plus tranquille – tel le père de Celdrán.
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