« La Guerre n’a pas un visage de femme » de Svetlana Alexievitch – comprendre grâce au récit choral de femmes oubliées ce que ça veut dire, « faire la guerre »
En 2015, l’autrice biélorusse Svetlana Alexievitch s’est vu remettre le Prix Nobel de littérature pour « son œuvre polyphonique, mémorial de la souffrance et du courage à notre époque ». Dès son premier texte publié en 1985, La Guerre n’a pas un visage de femme, l’autrice formée au journalisme a en effet inventé une manière d’écrire tissée d’innombrables témoignages mis en résonance. Cette forme d’écriture chorale lui a été inspirée par les récits de femmes russes qui ont participé à la Seconde Guerre mondiale, qu’elle est allée interroger afin d’offrir une perspective inédite sur l’Histoire, essentiellement écrite au masculin, et donner ainsi pour la première fois une pleine perception de ce que c’est, la guerre.« Le Firmament » de Lucy Kirkwood mis en scène par Chloé Dabert au TGP – femmes célestes sous la voûte du patriarcat
Après le CentQuatre et la Comédie de Reims qu’elle dirige, c’est au TGP que Chloé Dabert présente Le Firmament. Ce spectacle est la création française du texte de Lucy Kirkwood, autrice britannique dont une autre pièce, Les Enfants, est actuellement présentée au Théâtre de l’Atelier dans une mise en scène d’Éric Vignier. Lucy Kirkwood a plusieurs fois pratiqué le dialogue avec des œuvres existantes, en réécrivant des contes, en proposant une adaptation d’Hedda Gabler d’Ibsen, ou en reprenant, ici, les grandes lignes du scénario de Douze hommes en colère, pièce de Reginald Rose adaptée au cinéma par Sidney Lumet. Sur chacune de ces œuvres dont elle s’empare, l'autrice appose une perspective féministe. Peu après avoir travaillé avec des femmes victimes du système judiciaire pour une autre pièce, elle imagine dans Le Firmament une fiction qui se déroule dans l’Angleterre de 1756. Elle pratique cependant le télescopage des époques et l’anachronisme volontaire pour penser la place des femmes dans la société, les libertés acquises ou non depuis le XVIIIe siècle, et la survivance effrayante de problématiques liées à leur corps. Une grande intensité dramaturgique et scénique se dégage de la mise en scène de ce texte par Chloé Dabert.« Dissection d’une chute de neige » de Christophe Rauck à Nanterre Amandiers – mettre en perspective les débats de notre époque avec l’histoire
Retour au Théâtre Nanterre-Amandiers pour la première fois depuis le début des travaux de rénovation du lieu. Alors que le bâtiment est entouré de palissades, des signaux guident jusqu’aux grands hangars des ateliers de décor, qui ont déjà servi de salle auparavant. Le caractère un peu hostile de l’arrivée dans la nuit froide de la fin novembre est immédiatement dissipé une fois à l’intérieur. L'ambiance chaleureuse évoque le Théâtre du Soleil. Elle est créée par une librairie en forme de cabane qui regorge de trésors et par des murs tenturés de tapisseries sylvestres ornées de portraits royaux, qui mêlent peintures du XVIe siècles et photographies contemporaines. En embuscade dans cette série, se trouvent quelques photos du spectacle, Dissection d’une chute de neige, ainsi que le portrait de l’autrice suédoise, Sara Stridsberg. Son dernier texte est créé par Christophe Rauck, le nouveau directeur des lieux, qui a déjà adapté d’elle La Faculté des rêves, bientôt repris au même endroit. Dans cette pièce, l’écrivaine suédoise propose une relecture dramatique de la biographie exceptionnelle de Christine de Suède, qui lui permet de croiser les questions de l’exercice du pouvoir avec celles du genre. L’autrice féministe ne propose cependant pas une pièce militante ; elle fait plutôt de ce personnage au trouble identitaire profond la caisse de résonance de questions partagées par tous.« Orlando » de Virginia Woolf
Virginia Woolf dit d’Orlando dans son Journal que ce roman n’est qu’une farce, « une récréation d’écrivain ». Le sujet, le ton employé et même le style de cette œuvre l’isolent en effet au sein de sa création. De façon tout à fait étonnante, c’est même un nouveau visage de l’écrivain anglais que l’on découvre à travers cette œuvre, bien différent de celui que peuvent laisser transparaître La Promenade au phare, Les Vagues ou même Mrs Dalloway.…
« Journal à quatre mains » avec Lisa Schuster et Aude Briant
Nous sommes en mai 1940, rue Vanneau à Paris. Deux sœurs de bonne famille, Benoîte et Flora Groult, font part de leurs impressions sur les évènements internationaux et leur guerre à elles, celle de la jeunesse, dans un journal commun.…