Étiquette : Don Quichotte

« Don Quichotte » de Cervantès – d’une satire des romans de chevalerie à une démonstration en acte des pouvoirs de la littérature

Un demi-siècle après Rabelais, Cervantès écrit avec Don Quichotte l’un des premiers romans modernes de la littérature européenne. L’œuvre peut être considérée comme le roman des romans, tant elle contient d’œuvres à venir. Dix ans s’écoulent, entre l’écriture de la première partie, en 1605, et celle de la seconde. Plus encore que cette durée, c’est l’intégration de la réception de la première partie à la narration de la deuxième qui donne l’impression d’avoir presque affaire à deux œuvres distinctes. Leur dissociation repose également sur le fait que la première est la plus connue, alors qu’elle est pourtant la plus disparate, la plus étonnante dans sa structure – ou son absence de structure –, ce que met en évidence la deuxième par contraste. Il faut relire l’ensemble de manière cursive pour s’en rendre compte et rencontrer enfin cette œuvre dont on parle souvent sans l’avoir lue, pour paraphraser Pierre Bayard, qu’on connaît de réputation ou par ses extraits les plus célèbres, et appréhender ainsi sa composition déroutante, son mouvement inlassable, sa complexité, et tout ce qu’elle contient de littérature en puissance.
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« Don Quichotte » de Cervantès [extrait] – blâme et éloge des romans de chevalerie

Le chanoine écouta avec attention le curé, qui leur parla du caractère, de la vie, des habitudes et de la folie de don Quichotte, et leur exposa brièvement l'origine de ses extravagances et la suite de l’histoire, jusqu'au moment où on l'avait enfermé dans cette cage pour le ramener dans son village, avec l'espoir de le guérir de sa folie.
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« Quichotte » de Gwenaël Morin dans le Jardin de la rue de Mons – de l’importance de croire

Depuis Le Songe l’an dernier, rendez-vous est pris dans le Jardin de la rue de Mons avec Gwenaël Morin, invité pendant quatre ans à créer un spectacle en rapport avec la langue du Festival d’Avignon invitée. Cette année, le metteur en scène choisit un monument, si ce n’est le monument de la littérature de langue espagnole : Don Quichotte de Cervantès. Une de ces œuvres que tout le monde connaît sans même l’avoir lue, dont les personnages sont familiers, dont certaines scènes sont inlassablement reprises, mais que finalement très peu de monde a effectivement lue in extenso. Le projet de Morin promet ainsi la rencontre, ou au moins une rencontre avec cette œuvre. Pour s’en emparer, le metteur en scène réunit une équipe qui n’est pas historiquement la sienne, celle du Théâtre Permanent, comme l’an dernier. Il prend le parti de la célébrité et engage une tête d’affiche : Jeanne Balibar. Et une autre tête d’affiche, plus discrète mais tout aussi grande pour les gens de théâtre : Marie-Noëlle (ex Yves-Noël Genod). À leurs côtés, Thierry Dupont et Léo Martin, en alternance avec lui-même. Ils sont donc quatre pour ce roman de quelques mille pages qui fourmille de personnages, et cette disproportion paraît caractéristique de Morin. Cette œuvre, en ce lieu, avec ces artistes, retentissaient comme une promesse. Une promesse hélas non tenue, mal tenue, qui révèle l’importance de croire.
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Aliocha Karamazov, homme positivement beau et ami de l’humanité

Avant toute chose, je déclarerai que ce jeune homme, Aliocha, était tout sauf un fanatique, et, à mon avis, même, pas du tout un mystique. J'exprimerai à l'avance mon opinion la plus tranchée : c'était tout simplement un précoce ami de l'humanité, et, s'il s'était lancé sur la voie monastique, c'était pour cette raison unique qu'à ce moment-là c'était la seule qui l'eût frappé et lui eût présenté, pour ainsi dire, l'idéal pour le salut d'une âme qui aspirait, hors de la haine d'ici-bas, à se jeter vers la lumière de l'amour. Et si elle l'avait frappé, cette voie, c'était seulement pour cette raison que c'était là qu'il avait alors rencontré un être qu'il jugeait extraordinaire – notre célèbre starets du monastère, Zossima, auquel il s'était attaché par le premier et brûlant amour de son cœur insatiable.
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