« Médée, l’insomnie de l’amour monstre » par la Compagnie Arkadia

Le mythe de Médée n’est pas une histoire faite de rebondissements et de péripéties. Ce n’est pas non plus l’immobilité d’une conscience tiraillée par un dilemme insolvable. Non, Médée, c’est la passion, la folie, l’amour inconditionnel. Dans son spectacle hautement esthétique, Diana Dobreva met en valeur cet absolu.

On pourrait souhaiter maîtriser le mythe avant de se laisser hypnotiser par la représentation : Médée a renoncé à tout pour l’homme qu’elle aime, Jason, et elle a trahi sa famille en lui donnant la Toison d’or. Délaissée par le perfide, elle se laisse prendre par une jalousie dévorante qui la conduit à une série de meurtres, jusqu’à celui de son propre fils.

Dans la lecture qu’en fait Dobreva, il n’est pas nécessaire de s’appesantir sur toutes les étapes du mythe. La trame est réduite à ce qu’elle a d’essentiel. Ainsi, il est inutile de savoir que Médée part à l’étranger ou que l’homme tout vêtu de blanc est un précepteur. Ce qui nous est montré, c’est la puissance de l’émotion et des sentiments.

Le décor est pur, et les costumes monochromes, faits de tissus qui circulent comme des eaux, ne perturbent pas sa régularité. Peu de paroles sont échangées, laissant la part belle à la mise en scène et à une chorégraphie soignée. Cette grande fluidité joue sur des effets de démultiplication proche de l’illusion.

C’est la nature de magicienne de Médée qui est ainsi désignée. Le spectacle est envoûtant dans sa clarté et sa précision. On a l’impression d’assister à un rituel antique, servi par des formules incantatoires qui sont en réalité du Bulgare à l’envers. L’énergie circule d’un corps à un autre, des plus jeunes aux plus expérimentés.

Le sublime de la représentation l’emporte sur l’envie première de bien comprendre. On se laisse porter à l’envi, prêts à voir la représentation durer plus longtemps pour le plaisir des yeux.

F.

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