Étiquette : psychologie

« Dostoïevski, poète tragique », Stefan Zweig

Ses romans sont en quelque sorte des drames voilés, transformés ; en dernière analyse les Frères Karamazov représentent l’esprit même de la tragédie grecque, sont la chair de la chair de Shakespeare. Le colosse y est nu, sans défense et petit sous le ciel tragique de la destinée. Dans ces instants de crises et de chutes le ton narratif des œuvres de Dostoïevski disparaît. L’ardeur des sentiments fait fondre leur légère enveloppe épique ; elle s’évapore, il ne reste plus rien que le dialogue à la véhémente ardeur. Les grandes scènes de ses romans sont de purs dialogues dramatiques. Chaque personnage y est si bien charpenté, l’ample flot du récit se cristallise aux instants critiques à tel point que l’on peut les transporter sur la scène sans changer un mot. Le sens du tragique qui pousse Dostoïevski vers l’acte définitif, vers la tension violente, vers la catastrophe foudroyante, transforme alors ses chefs-d’œuvre épiques en chefs-d’œuvre dramatiques.
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« Electre/Oreste » mis en scène par Ivo van Hove – Euripide dionysiaque

Le metteur en scène belge Ivo van Hove côtoie de près la France ces temps-ci. Alors qu’était programmé il y a peu à la Villette The Hidden Force, pour quelques dates, on le retrouve à la Comédie-Française pour Electre/Oreste. Les acteurs de la Troupe jouent en alternance ce spectacle avec entre autres Les Damnés, œuvre du même Ivo van Hove créée à Avignon en 2016 et toujours jouée depuis, d’après le scénario de Luchino Visconti. Des Damnés à cette nouvelle création, le metteur en scène dit soulever des questions similaires, qui créent un écho à notre monde contemporain. Avec ces deux tragédies, présentées dans la parfaite continuité l’une de l’autre, se dégage tout particulièrement le motif de la surenchère de la violence, de l’engrenage sans fin des vengeances qui entasse les morts – logiques mortifères qu’aucun Apollon ne peut plus aujourd’hui apaiser.
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Dostoïevski, entre l’art et la science – Dmitri Merejkowski

Pour certains lecteurs, Dostoiewsky sera toujours un talent cruel, et rien autre que cruel.

C’est qu’en effet il place ses héros dans des situations sans issue et se plaît à les soumettre à toutes sortes d’épreuves. C’est à travers des abîmes de déchéance morale, et toutes les tortures de l’esprit, qu’il les mène au crime, au suicide, à l’idiotie, à la fièvre chaude et à la démence.…

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