« Mausolée » de Louise Chennevière [extrait] – tombeau de mots pour l’amour

[…] je ne sais pas son vrai nom, celui qu’elle m’a dit n’était pas le sien, alors je ne dirai pas non plus comment elle était faite, personne ne saura jamais qui a couché avec qui, toute une nuit, sur un pont, en plein milieu d’une ville, des traces y sont encore, là-bas, dans la pierre : tu te promènes n’importe où, un soir par hasard, tu vois une fille penchée juste au-dessus de l’eau, tu t’approches par hasard, elle se retourne, te dit : moi mon nom c’est mama, ne me dis pas le tien, ne me dis pas le tien, tu ne lui dis pas ton nom, tu lui dis : où on va ?…
Gisèle Vienne reprend aux Amandiers de Nanterre This Is How You Will Disappear, créé en 2010 à Avignon. Dans ce spectacle, elle joue avec les codes du film d’horreur et ceux de la représentation, donnant à voir une œuvre déroutante.…
[…]
MARIE – Grand-père, ne le dites pas ce soir !…
LE VIEILLARD – Tu perds courage aussi… Je savais bien qu’il ne fallait pas regarder. J’ai près de quatre-vingt-trois ans, et c’est la première fois que la vue de la vie m’a frappé.…
« Ah, si vous voyiez les jardins de Milan », dit-elle tout haut. Mais à qui ?
Il n’y avait personne. Ses paroles s’évanouirent. Comme s’évanouit une fusée. Ses étincelles, s’étant frayé un chemin dans la nuit, viennent s’y fondre, le noir descend, vient noyer les contours des maisons et des tours ; les collines ternes s’estompent et s’effondrent.…