Étiquette : confinement

« _jeanne_dark_ » de Marion Siéfert – spectacle vivant 2.0 par temps de confinement

Après les captations de spectacle diffusées en différé, les captations live (telles qu’en proposent en ce moment la Comédie-Française ou le Théâtre de la Ville, entre autres), les lectures live, les podcasts alternatifs… Marion Siéfert, artiste associée au Théâtre de la Commune d’Aubervilliers, nous invite à découvrir un nouvel avatar de spectacle vivant avec _jeanne_dark_, performance diffusée en live sur Instagram. Ce format n’est pas la simple conséquence du confinement, son projet était d’emblée conçu à partir de ce réseau social : lors de sa tournée française tout au long de l’automne, le spectacle était supposé être retransmis en live sur Instagram en même temps qu’il était présenté en salle. Contrairement à d’autres spectacles condamnés à des reports, voire à des annulations, le deuxième confinement mis en place depuis quelques semaines n’a pas complètement anéanti les possibilités de représentation de ce spectacle. Il les a peut-être même démultipliées : le 19 novembre, nous étions près de 600 à suivre le direct du compte Instagram de @_jeanne_dark_. Outre la médiation d’un écran, qui chaque fois affaiblit le rapport du spectateur à l’œuvre, la particularité de ce mode de diffusion via un réseau social est qu’il permet de reformer une espèce de communauté autour du spectacle. A côté de l’image de l’actrice défilent à toute allure les commentaires instantanés des spectateurs, qui profitent de l’espace que leur accorde l’application pour se libérer de la contrainte du silence qu’impose la présence en salle. A côté du spectacle que propose @_jeanne_dark_, s’improvise chaque soir celui des spectateurs qui réagissent à ce qu’elle raconte et ce qu’elle fait, et ce spectacle-là est presque aussi fascinant que le premier.
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« Littoral » de Wajdi Mouawad à la Colline – Le théâtre est mort, vive le théâtre !

En 2009, la tétralogie Le Sang des promesses, composée de Littoral, Incendies, Forêts puis Ciels, faisait événement lors du Festival d’Avignon. Elle découvrait à ceux qui l’ignoraient encore le metteur en scène libano-québécois Wajdi Mouawad et son théâtre profondément épique. Aujourd’hui, l’artiste est directeur du Théâtre National de la Colline. Malgré la fermeture des lieux publics ces derniers mois, il a continué d’occuper une place dans le paysage théâtral désormais numérisé (majoritairement composé de rediffusions de captations), grâce à son journal de confinement audio. Les tirades poétiques qu’il confiait à son portable, livrant des réflexions sur la crise que nous traversions, étaient mises en partage sous la forme d’un podcast. Le metteur en scène ne s’en est pas tenu là, et a en outre décidé de rouvrir le théâtre avant la traditionnelle trêve estival – quitte à ce que ce soit pour quelques semaines seulement et avec des possibilités limitées –, et de le rouvrir avec Littoral, justement, l’un des spectacles qui l’avaient fait connaître. La pièce, une nouvelle fois recréée, avec deux distributions différentes, gagne en portée dans ce contexte si particulier, et invite à clamer : « Le théâtre est mort, vive le théâtre ! »
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« La Montagne magique » de Thomas Mann [extrait] – nouveauté, habitude et perceptions du temps

C’est au fond une aventure singulière que cette acclimatation à un lieu étranger, que cette adaptation et cette transformation parfois pénible que l’on subit en quelque sorte pour elle-même, et avec l’intention arrêtée d’y renoncer dès qu’elle sera achevée, et de revenir à notre état antérieur. On insère ces sortes d’expériences, comme une interruption, comme un intermède, dans le cours principal de la vie, et cela dans un but de « délassement », c’est-à-dire afin de changer et de renouveler le fonctionnement de l’organisme qui courait le risque et qui était déjà en train de se gâter, dans le train-train inarticulé de l’existence, de s’y fatiguer et de s’y énerver.
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« La Vie de Galilée » de Brecht [extrait] – « Rentre chez toi, sur-le-champ. »

"Mon Dieu ! Il faut plier bagages." "Cette épidémie est partout." "Pouvez-vous me dire, mes sœurs, où je pourrais acheter du lait ?" "Rentre chez toi, sur-le-champ." "Ils n’éteignent plus le feu quand la peste menace. Chacun ne pense plus qu’à la peste." "Qui sait aujourd’hui ce que demain sera ?" "Comme si un livre avait de l’importance maintenant."
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