Étiquette : Mounir Margoum

« Les Paravents » de Genet, mis en scène par Arthur Nauzyciel – monument aux morts, à l’adresse des vivants

À l’invitation du directeur du Théâtre de l’Odéon et de son programmateur, Arthur Nauzyciel a choisi de mettre en scène Les Paravents de Jean Genet – auteur dont il avait monté Splendid’s en 2015. Le spectacle a été créé en septembre dernier au Théâtre National de Bretagne que Nauzyciel dirige, et le voilà qui clôt la saison du Théâtre de l’Odéon. Entre temps, ces Paravents n’ont pas tourné, ce qui s’explique sans doute par l’ampleur de ce spectacle, sa scénographie monumentale, sa vaste distribution de seize personnes et sa durée de quatre heures. Il n’en faut pourtant pas moins pour représenter cette pièce-monstre de Genet, pièce qui paraît parfois si abstraite et injouable à la lecture. Après Roger Blin en 1966 et Patrice Chéreau en 1983, il était temps qu’un grand metteur en scène de notre époque s’attaque à cette œuvre et y donne accès aux nouvelles générations afin d’en faire percevoir tout à la fois la folie, l’exubérance provoquante et la puissance théâtrale extraordinaire. Nauzyciel pose ainsi un nouveau jalon dans l’histoire des mises en scène de cette pièce et relance avec elle la réflexion sur sons sens et les partis pris auxquels elle oblige.
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« Antoine et Cléopâtre » de Shakespeare mis en scène par Célie Pauthe aux Ateliers Berthier – l’ambition de l’exhaustivité

La saison théâtrale touche à sa fin avec deux longs spectacles : L’Odyssée de Krzysztof Warlikowski d’une part, à la Colline, et Antoine et Cléopâtre de Célie Pauthe, à l’Odéon. Outre leur durée (3h45 chacun), les deux spectacles se ressemblent par leur ambition toute épique. Tandis que le metteur en scène Polonais émaille le récit homérien de multiples références, la directrice du CDN de Besançon entreprend de suivre tous les fils entremêlés de la pièce la plus longue de Shakespeare, une pièce tentaculaire qui se déroule sur plusieurs années entre Rome et Alexandrie, puis entre Athènes et les champs de bataille d’Actium qui servent de décor aux dernières scènes. La pièce n’est pas adaptée, mais bien montée de bout en bout dans la nouvelle traduction d’Irène Bonnaud, avec 13 acteurs sur scène pour incarner la trentaine de personnage. L’espace magnifique créé par Guillaume Delaveau accompagne dans un long et tortueux voyage entre Orient et Occident et à travers le temps.
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« Bajazet, en considérant le Théâtre et la peste » de Castorf à la MC93 – parcelles brillantes d’humanité au coeur du chaos

Alors que le corpus qu’il avait constitué au fil des ans le tenait à distance de la littérature française, l’Allemand Frank Castorf s’intéresse à Racine en cette fin d’année, après le Don Juan de Molière en 2018. Parmi ses pièces, il choisit Bazajet, tragédie de l’amour et du pouvoir, mais surtout tragédie de l’Orient, du sérail, des sultans et des esclaves. Contrairement à ses habitudes, Castorf précise néanmoins le titre de son spectacle : Bazajet, en considérant le Théâtre et la peste. Il annonce ainsi d’emblée lire Racine à la lumière d’Artaud – ou l’inverse. L’indication annonce également de manière plus implicite que le metteur en scène fait preuve dans ce spectacle d’une conscience aigüe de son art, qui le rend pleinement maître de ses moyens.
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