« L’Impressionnisme et la mode » au Musée d’Orsay

L’exposition L’Impressionnisme et la mode attire un public varié au musée d’Orsay. Férus du mouvement pictural et passionnés de mode de tous âges s’y retrouvent et voient leurs attentes comblées par un parfait équilibre entre ces deux objets ici rassemblés. Grâce à la scénographie extrêmement élaborée de Robert Carsen la visite est un véritable voyage dans le XIXe siècle, qui fait presque regretter l’époque des corsets !

L'Impressionnisme et la mode« Le peintre moderne est un excellent couturier ». C’est avec cette citation d’Huysmans que la visite débute. D’emblée, il apparaît que ce sont moins deux mais trois arts qui ont été réunis dans cette exposition : la peinture, la mode, mais aussi la littérature. De nombreuses citations, de Baudelaire, de Zola ou de Du Camp ornent en effet les murs colorés de l’exposition. A travers elles, l’élégance de la parisienne, indissociable de ses innombrables attributs, est magnifiquement chantée.

En guise de préambule, les commissaires de l’exposition nous invitent à mesurer le rôle déterminant des journaux de modes du XIXe. Dessins, patrons et échantillons de tissus sont ainsi présentés sous vitrine, illustrés par toutes sortes d’accessoires – chaussures, ombrelles, éventails, canes et charmant carnet de bal. Les peintures sont encore rares mais le rapprochement frappe par sa justesse : on découvre un Renoir qui représente une jeune fille consultant cette sorte de magazine et deux Cézanne peints d’après dessins de modiste.

De longues vitrines nous montrent également des robes typiques de l’époque. Les cartels qui les accompagnent, par leurs descriptions très techniques, révèlent un art élaboré et raffiné ainsi qu’une codification très précise en fonction de l’heure de la journée et des saisons. Avant d’entrer dans le vif du sujet, une première équivalence : le portrait de la femme d’Albert Bartholomé, Dans la serre, et la robe dans laquelle elle a été peinte en vitrine. Pas de doute, l’exposition s’annonce délicieuse.

James Tissot - Seaside & Portrait of Miss LloydPar la suite, les robes se font plus rares et laissent place aux toiles. A partir de là, quand elles sont invoquées, c’est avec une pertinence réjouissante – telle cette robe jaune que James Tissot peint à deux reprises, sur deux femmes différentes. Par ce prisme de l’habit, les peintures bien connues de ce dernier, d’Edouard Manet, d’Auguste Renoir, de Claude Monet, de Gustave Caillebotte, de Camille Pissaro ou encore de Berthe Morisot sont redécouvertes.

Des textes courts et efficaces, joliment intégrés à la scénographie, rappellent les us et coutumes de l’époque et aiguisent le regard du spectateur. Dès lors, il s’agit de discerner si la femme représentée est vêtue d’un habit de matinée ou d’une robe du soir, ou de deviner de quelle matière est sa robe avant d’en trouver la réponse dans le cartel.

Les différentes salles de l’exposition ont été pensées de façon thématiques : les robes d’intérieur, celles de soirées, pour le bal ou le théâtre, les tenues d’été et de plein air, les chapeaux, mais aussi les costumes d’hommes, qui, par leur sobriété, mettent en valeur les toilettes des femmes. Une magnifique scénographie a été imaginée par Robert Carsen pour rendre compte de ces différents moments de la vie quotidienne du XIXe : à chaque salle, le visiteur découvre un nouveau papier peint et un nouvel univers sonore, discrets mais puissants par leur effet immersif. Quelle étrangeté de voir une femme au piano dans une peinture de Théodore Robinson et d’entendre une mélodie qui semble en sortir ! Ou encore, clou du spectacle, de sentir le sol se modifier dans la dernière salle, et de découvrir sous ses pieds une moquette qui imite l’herbe et des bancs verts comme on en voit dans les parcs !

Renoir - La balançoireLa mise en condition est plus que réussie, et décuple le plaisir de revoir ces peintures. Il est vrai qu’une telle finesse dans les rapprochements avait fait naître le désir de voir une version originale de la robe de la jeune femme à la balançoire de Renoir, mais la déception n’est que mineur face à toute cette mise en scène.

De plus, de façon habile, le spectateur est préparé à son retour au XXIe siècle : d’immenses miroirs placés en vis-à-vis de grandes toiles lui renvoient à plusieurs reprises son reflet. D’abord surpris de se voir surgir au côté d’une femme élégamment vêtue, il se prend à observer ses pairs, saisis le temps d’un instant au travers d’un cadre, dans une attitude pensive. Si la recherche de raffinement est nettement moins poussée, le constat n’est pas si nostalgique, et cette réinsertion du présent dans le passé nous réconcilie avec notre temps.

 F.

Pour en savoir plus sur cette exposition, rendez-vous sur le site du Musée d’Orsay.

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