« L’Académie Française au fil des lettres » au Musée des Lettres et des Manuscrits

Le Musée des Lettres et des Manuscrits, avec son exposition « L’Académie Française, au fil des lettres », explore dans ses moindres recoins cette institution, incontournable et pourtant quelque peu inaccessible.

Dans cet espace, à première vue restreint, consacré à l’exposition temporaire, le parcours du visiteur n’est pas particulièrement balisé. Les panneaux d’explications et les cartels viennent vite titiller sa curiosité et le conduisent à se plonger dans les vitrines, de haut en bas.

Les époques et les auteurs se mêlent, mais dans une certaine mesure seulement, heureusement. On commence évidemment avec la création de l’Académie en 1635, sous la tutelle de Richelieu, et dont la mission première est de se faire la défenseuse de la langue française. Dictionnaires et origines de l’habit vert introduisent en douceur dans les écritures emmêlés de ceux qui furent – ou tentèrent d’être –  ses membres.

Difficile de s’arrêter à chaque lettre et de jouer le jeu de la déchiffrer avant de lire la légende. C’est l’affection pour l’un ou l’autre qui nous fait avancer. C’est l’occasion de découvrir avec ravissement les écritures de Claudel, Pagnol, Valéry ou Cocteau, harmonieuses et lisibles ; ou de s’effrayer face à celles de Bossuet, Francis Jammes ou Maurois.

Les manœuvres de candidatures ou les stratégies de parrainages se dévoilent, et avec eux, les amitiés et les complicités. On rencontre aussi des personnalités, dont la fierté interdit de s’abaisser à briguer un siège, comme Montherlant et ses brouillons spectaculaires, ou au contraire des lettres de candidature enflammées. L’étonnement est grand au moment de lire qu’aujourd’hui encore le Président de la République est le dernier à valider une nomination, après le vote à la majorité absolue des Immortels.

Entre deux épreuves du Littré, on apprend que les discours de réception ont été soumis à une lecture préalable depuis La Bruyère. Sa plume acérée et vive n’a pu s’empêcher de croquer un ou deux académiciens, vexés. Quelques siècles plus tard, c’est ce qui a empêché Chateaubriand d’y entrer véritablement, et ce qui a pressé sont départ pour la Vallée au Loup.

Le « 41ème fauteuil », celui des refusés, a aussi sa place, bien sûr. C’est là que tous les absents – et ils sont nombreux – sont comptés : Molière, Diderot, Balzac, Flaubert, Stendhal, Nerval, Maupassant ou encore Proust. De là, des pamphlets ironiques, des caricatures et des critiques amères.

Malgré cela, et auparavant, malgré la Révolution Française et d’autres accusations liées à la religion durant le siècle des Lumières, l’institution survit et rayonne. Elle élargit ses rangs aux philosophes, aux hommes politiques et parfois même aux chimistes, restant un signe incontestable de reconnaissance et de valeur.

 

Certes, les lettres ne sont pas ce qu’il y a de plus facile à mettre en valeur, mais c’est la richesse de ce jeune musée, qui réussit à s’en servir pour offrir une riche rétrospective et qui réjouit les littéraires les plus fétichistes.

 

 

F.

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