En 1935, le peintre italien Carlo Levi est « confiné » pendant un an, c’est-à-dire envoyé en résidence surveillée dans un petit village du sud de l’Italie à cause de ses activités politiques antifascistes. Son expérience est comparable à celle de Dostoïevski au bagne : le peintre qui a une formation de médecin est marqué à vie par son séjour dans la région la plus pauvre de son pays, la Lucanie (qui correspond à l’actuel Basilicate), et le récit qu’il en tire à la fin de la Seconde Guerre mondiale fait de lui un écrivain. Son témoignage, d’apparence essentiellement descriptif, est pénétré par le syncrétisme des paysans, ce qui lui donne l’allure d’un conte ou d’un récit évangélique – ou plus précisément d’un chapitre du Livre de Job.