« 10 Millones » de Carlos Celdrán – décharge collective

Vingt ans après la création de sa compagnie, Argos Teatro, le metteur en scène Carlos Celdrán a créé l’année dernière 10 Millones. Un de ces spectacles rapidement pris d’assaut par le public cubain, une fois encensé par le bouche à oreille qui fait ici office de réclame. Après plusieurs mois à attendre que la compagnie revienne de tournée, l’œuvre finalement découverte s’est révélée à la hauteur de l’engouement qu’elle a suscité, tant du point de vue théâtral que des problématiques aigües qu’elle charrie.

A l’origine de 10 Millones, il y a un texte autobiographique, écrit sous la forme d’un journal, sur près de dix ans. Un de ces textes cathartiques, qui s’impose de lui-même et permet de décharger un être de l’histoire qui l’encombre en la mettant à distance. Carlos Celdrán retrace le parcours de l’enfant qu’il a été, mais peut-être plus encore celui de ses parents, qui l’a profondément déterminé. Leur histoire est celle de toute une génération, celle qui a connu la Révolution cubaine et qui s’est déchirée en deux camps : les partisans de la Révolution, pris d’une nouvelle passion politique et d’un espoir sans limite – telle la mère de Celdrán –, et les sceptiques, qui ont préféré renoncer à un idéal qui paraissait trop beau pour être vrai, pour se consacrer à une vie plus tranquille – tel le père de Celdrán.

Dès le départ, l’élan révolutionnaire de la mère rend caduque un lien amoureux déjà fragile, et la séparation s’ensuit. L’enfant est alors pris entre les deux, entre sa mère qui consacre toute son énergie au Parti et à ses principes, et son père qu’il ne voit que l’été, après l’avoir entendu traité de faible et d’incapable tout le reste de l’année. En plus de ce déchirement, il doit encore se débattre avec l’école, qui tente de le formater, et les médecins auxquels on l’envoie pour le rendre plus « normal » et face auxquels il lutte pour ne pas laisser lui échapper sa vérité quant à son orientation sexuelle. Ses seules échappées sont la littérature – Julien Sorel devient son confident – et ses premières émotions amoureuses.

L’histoire cubaine précipite son drame. D’abord avec l’échec de la campagne des « 10 millions » – objectif en tonnes donné par l’Etat pour relancer l’économie du pays en 1970 avec la culture du sucre –, puis avec la crise de l’ambassade du Pérou qui se conclut avec l’exode de Mariel. Son père est directement impliqué dans le deuxième événement, faisant partie de ces milliers de Cubains qui réclamaient des visas pour quitter le pays, et qui siégeaient dans l’ambassade, pendant que les enfants de la Révolution – les leurs – étaient contraints de défiler dans les rues en signe de protestation contre ceux que l’on désignait comme des traîtres. Leur départ leur a été finalement accordé, mais à la condition qu’ils partent de chez eux, qu’ils repassent par la porte de chez eux. Une telle exigence les soumettait aux critiques de leurs proches, de leurs voisins, qui comme la mère, voulaient encore y croire. Cette marche de la honte, qui a parfois même pris la forme d’un lynchage, signe pour de bon la fin de l’enfance de celui qui ne reverra son père qu’à Miami – où, comble de l’ironie, la mère finira par partir aussi.

Retrouvant son regard d’enfant et écrivant a posteriori, Carlos Celdrán ne fait peser aucun jugement sur ses deux parents. Ce qui est beau dans ce texte – ce qui est même tragique comme l’envisagerait Albert Camus – c’est que l’auteur accepte que personne n’avait tort, et personne n’avait raison. Chacun faisait comme il le pouvait dans ce contexte bien particulier, et se persuadait à sa façon pour donner sens à son attitude. Renonçant à tenir un discours objectif, qui risquerait de départager ses parents, mais plus encore de simplifier leur histoire, Carlos Celdrán tente de prendre pleinement en charge la complexité du passé. Seule cette échelle humaine, biographique, peut tolérer les revirements, peut faire envisager qu’on délaisse des convictions qui paraissaient vitales quelques temps plus tôt. C’est d’ailleurs la même qu’on retrouve dans Retour à Ithaque, film de Laurent Cantet qui aide un peu à faire comprendre ce qu’est Cuba aujourd’hui. Un autre point commun rassemble ces deux œuvres : de la même façon que le film tend vers la pièce de théâtre par son format, l’œuvre autobiographique devient œuvre scénique, comme si l’entre-deux générique était finalement consubstantiel à ces histoires – d’entre-deux elles aussi.

Car avant d’être auteur, Celdrán est metteur en scène. Depuis 20 ans, il a monté Ibsen, Tchekhov, Brecht, Koltès ou Beckett, et son travail, chaque fois accueilli avec succès, a fait de lui l’un des metteurs en scène les plus importants de Cuba – au point de se voir remettre le Prix National de la mise en scène l’an dernier. Une fois sa confession achevée, une fois déchargé de son histoire, il a donc eu l’intuition qu’il pourrait faire théâtre de ce texte. Parce qu’il est loin de ne parler que de lui, et parce que le théâtre, plus encore que la littérature, est le meilleur moyen de lutter contre l’oubli, de briser le silence qui entoure ces dernières décennies.

Celdrán entreprend donc de construire un spectacle, à partir d’un récit qu’il laisse tel quel, qu’il n’adapte pas. Cela, il le peut car il connaît tous les ressorts du théâtre et leur fait confiance. Pour la scénographie, il fait le choix d’un dispositif simple – d’une simplicité rare ici, alors que d’autres compagnies cubaines tentent de faire du théâtre avec des moyens alors qu’ils n’ont précisément pas de moyens – : un sol structuré par deux niveaux et un mur au fond, qui devient tableau grâce à des indications tracées à la craie. Elles serviront de repères en indiquant les chapitres traversés, et parfois même les dates des événements évoqués. Pour le reste, tout le travail du metteur en scène réside dans l’orchestration des apparitions, disparitions et déplacements, selon les nécessités de la narration. Celdrán y apporte un grand soin, pour que soit encore fluide la dixième fois que Daniel Romero, qui incarne l’enfant qu’il était, enlève et remet ses chaussures ou se change pour passer d’un uniforme à l’autre.

Pour faire entendre un tel texte à la scène, la tentation du monologue pourrait être grande. Mais l’écriture de Celdrán est telle que la polyphonie s’impose d’emblée, et plusieurs voix se distinguent : celle de l’adulte (Waldo Franco), celle de l’enfant (Daniel Romero), celle du père (Caleb Casas) et celle de la mère (Maridelmis Marín). Ils sont donc quatre sur scène, et à eux quatre, ils vont raconter l’histoire exemplaire – au sens propre – de cette famille. La raconter et parfois la jouer, à tour de rôle et de voix. Deux modes de narration coexistent donc, et impliquent de multiples strates de jeu qui s’imbriquent, entre présence et absence, distance et proximité : jouer, raconter, raconter le personnage que l’on incarne, ou raconter un autre personnage.

Toutes ces modulations ont pour fonction de dompter l’émotion. Il s’agit d’abord de la faire surgir, puis de la contenir, et de la communiquer. Dans ce projet, elle est d’une complexité particulière. Au départ, dans l’écriture, elle est brute, sincère, entière. Le passage au théâtre oblige à la maîtriser, et par d’autres que par l’auteur. Chaque soir, elle a beau être rejouée, il faut qu’elle soit là, et paraisse neuve. Les larmes des comédiens – en particulier du plus jeune, Daniel Romero, dont ce n’est déjà plus l’histoire – disent le caractère factice du théâtre, en même temps qu’elles le désamorcent car elles paraissent inévitables avec un tel texte. Le théâtre se trouve pris à son propre piège, l’émotion paraît parfois de l’ordre du jeu – mené à un très haut niveau –, d’autres, elle paraît déborder.

Mais cet entre-deux qui soulève une vraie question sur l’art théâtral est rattrapé par une autre émotion, dont le caractère spontané ne fait cette fois aucun doute : celle de la salle. Il n’y a pas dans ce spectacle de séparation entre les comédiens et les spectateurs. Un regard, un doigt qui pointe, et c’est explicitement de tous les Cubains dont il est question, quel que soit leur âge ou leur histoire. Et cette identification, elle ne se limite pas à une intention, elle s’impose comme une évidence par la façon dont l’émotion circule d’un espace à l’autre, quand aux pleurs des comédiens répondent les sanglots difficilement retenus du public. L’émotion est peut-être jouée sur scène – et encore une fois, avec une technique impressionnante –, l’effet produit, lui, est authentique, et il donne sens à ce jeu. Là, le théâtre, en tant que partage, plus fort que la lecture parce qu’il est collectif, qu’il s’opère dans un même temps et un même lieu, prend son sens. Là, il retrouve sa fonction antique de purgation des passions, dont on perçoit encore les effets à la sortie du théâtre, alors que les yeux sont rouges et les corps voûtés.

Quelques jours après la décision d’Obama d’abroger la loi « pieds secs pieds mouillés », qui permettait aux Cubains qui quittent l’île de façon clandestine de trouver asile aux Etats-Unis, le spectacle de Celdrán retentit avec une force particulière. Alors qu’on aurait pu croire que beaucoup déploreraient cette décision, certains disent qu’enfin les familles ne seront plus séparées, qu’enfin des individus arrêteront de risquer leur vie dans l’espoir de mieux vivre ailleurs. Et à la pensée que le spectacle sera présenté à Miami pour la première fois dans quelques semaines, on imagine déjà l’effet extraordinaire qu’il aura, face à un public qui lui a effectivement pris la décision de partir. Il ne faudrait pas rater là l’occasion de filmer la salle, car l’émotion des spectateurs offre non seulement le meilleur reflet du spectacle que l’on puisse imaginer, mais elle fait partie intégrante de cette œuvre.

 

F.

 

Pour en savoir plus sur « 10 Millones », rendez-vous sur le site du Argos Teatro.

Veinte años después de la creación de su grupo, Argos Teatro, el director Carlos Celdrán creó el año pasado 10 Millones. Unos de esos espectáculos rápidamente tomado por asalto por el publico cubano, una vez ensalzado por el boca a boca que tiene aquí el papel de reclamo. Después de unos meses esperando que el grupo regrese de gira, la obra finalmente descubierta se reveló a la altura del entusiasmo que suscitó, tanto desde el punto de vista teatral como de las problemáticas agudas que lleva.

En el origen de 10 Millones, hay un texto autobiográfico, escrito como un diario, durante casi 10 años. Un texto catártico, de los que se imponen en si mismo, y que permiten descargar a uno de la historia que lo estorba, poniéndolo a distancia. Carlos Celdrán reconstituye el trayecto del niño que fue, pero quizás aun más el de sus padres, que lo determinó profundamente. La historia de sus padres es la de toda una generación, la que vivió la Revolución cubana y que se desgarró entre dos campos : los partidarios de la Revolución, tomados por una nueva pasión política y por una esperanza sin límites – como la madre de Celdrán –, y los escépticos, que prefirieron renunciar a un ideal que parecía demasiado bello para ser verdadero, para dedicarse a una vida más tranquilla – como el padre de Celdrán.

Desde los principios, el vinculo amoroso ya frágil se vuelve caduco por el impulso revolucionario de la madre, y la separación conlleva. El niño resulta bloqueado entre los dos, entre su madre que da toda su energía al Partido y a sus principios, y su padre al que solo ve durante el verano, después de haberlo entendido tratar de débil e incapaz todo el resto del año. Además de éste tormento, tiene encima que debatirse con la escuela, que intenta predisponerlo, y los médicos que ve para volverlo más “normal”, y contra los cuales tiene que luchar para que la verdad de su orientación sexual no se le escape. Sus únicas escapatorias son la literatura – Julien Sorel se vuelve su confidente – y sus primeras emociones amorosas.

La historia cubana precipita su drama. Primero con el fracaso de la campana de los “10 millones” – objetivo en toneladas dado por el Estado para reactivar la economía del país en 1970 con la cultura del azúcar –, y después con la crisis de la embajada del Perú, que se concluye con el éxodo de Mariel. Su padre esta directamente implicado en el segundo evento, formando parte de esos miles de Cubanos que pedían visas para salir del país, y que ocupaban la embajada, cuando los niños de la Revolución – sus hijos propios – estaban forzados a desfilar en las calles, en signo de protestación contra los que estaban llamados traidores. Su salida del país fue al final otorgada, pero a condición de que iban a salir desde sus casas, pasando tras la puerta de sus casas. Tal exigencia les sometía a las criticas de sus parientes y amigos cercanos, de sus vecinos, quien como la madre, todavía querían creer en la Revolución. Esta marcha de la vergüenza, que tomó a veces la forma de un linchamiento, se convierte para siempre en la señal del fin de la infancia para el niño, que solo verá de nuevo su padre en Miami – donde, ironía extrema, la madre se irá también.

Hallando su mirada de niño y escribiendo a posteriori, Carlos Celdrán no deja pesar ningún juicio sobre sus padres. Lo bello en éste texto – y aun lo trágico como lo pensaría Albert Camus – es que el autor acepta que nadie estaba equivocado, y nadie tenía razón. Cada uno hacía como podía en éste contexto bien particular, y se convencía a su modo de su elección para dar sentido a su actitud. Renunciando a tener un discurso objetivo, que arriesgaría a desempatar sus padres, pero aun más de simplificar su historia, Carlos Celdrán intenta hacerse totalmente cargo de la complejidad del pasado. Solo una escalera humana, biográfica, puede tolerar los cambios de opinión, puede permitir pensar que se dejen las convicciones que parecían vitales algún tiempo atrás. Es la misma escalera que se encuentra en Regreso a Itaca, película de Laurent Cantet que ayuda un poco a entender lo que es Cuba hoy. Otro punto en común acerca estas dos obras : de la misma manera que ésta película tiende a una obra de teatro por su formato, la obra autobiográfica se vuelve obra escénica, como si el entre-dos genérico estaba consubstancial a esas historias – de entre-dos ellas también.

Pues antes de ser un autor, Celdran es un director. Desde hace 20 años, ha puesto en escena Ibsen, Tchekhov, Brecht, Koltès o Beckett, y su trabajo, cada vez recibido con éxito, lo hizo uno de los directores lo más importante de Cuba – hasta el punto de verse galardonado con el Premio Nacional de Teatro el año pasado. Una vez su confesión acabada, una vez descargado de su historia, tuvo entonces la intuición de que podría hacer teatro de éste texto. Porque está lejos de hablar solo de si mismo, y porque el teatro, aun más que la literatura, es el mejor medio para luchar contra el olvido, de romper el silencio que encierra estas últimas décadas.

Celdrán emprende entonces a construir un espectáculo, a partir de un relato, que deja tal, que no adapta. Eso, lo puede llevar a cabo porque conoce todos los recursos del teatro y se fía de ellos. Para la escenografía, elige un dispositivo simple – de una sencillez rara aquí, mientras que otros grupos cubanos intentan proponer un teatro con medios, cuando no tienen medios, precisamente – : un suelo estructurado por dos niveles y una pared al fondo, que se vuelve una pizarra gracias a indicaciones trazadas con una tiza. Servirán de puntos de referencia, indicando los capítulos atravesados, y a veces incluso las fechas de los eventos evocados. Para el resto, todo el trabajo del director reside en la orquestación de las apariciones, desapariciones y desplazamientos, según las necesidades de la narración. Celdrán pone en eso un gran cuidado, para que sea de nuevo fluido la decima vez que Daniel Romero, que incorpora el niño que fue, se quita y vuelve a ponerse los zapatos o se cambia para pasar de un uniforme a otro.

Para hacer entender un texto de éste tipo sobre una escena, la tentación del monólogo podría ser grande. Pero la escritura de Celdrán es tal que la polifonía se impone de entrada, y varias voces se distinguen : la del adulto (Waldo Franco), la del niño (Daniel Romero), la del padre (Caleb Casas) y la de la madre (Maridelmis Marín). Están entonces cuatro sobre la escena, y entre ellos cuatro, van a contar une historia ejemplar – en el sentido propio – de ésta familia. Contarla y a veces actuarla, por turno. Dos modos de narración coexisten así, e implican múltiples estratos de juego que se encajan, entre presencia y ausencia, distancia y proximidad : actuar, contar, contar el personaje que encarna, o contar otro personaje.

Todas esas modulaciones tienen la función de domar la emoción. Hay primero que hacerla surgir, y después contenerla, y comunicarla. En este proyecto, es particularmente complejo. Al principio, en la escritura, está bruta, sincera, entera. La traslación al teatro obliga a dominarla, y por otros que el autor. Cada noche, por más que sea de nuevo actuada, tiene que estar aquí, y que parezca nueva. Las lágrimas de los actores – y especialmente del más joven, Daniel Romero, de lo cual ya no es más la historia – dicen el carácter ficticio del teatro, al mismo tiempo que lo desactiva, porque parecen inevitables con tal texto. El teatro se encuentra caído en su propia trama, la emoción parece a veces del orden del juego – llevado a un nivel muy alto –, y a otras, parece rebosar.

Pero éste entre-dos que plantea una verdadera cuestión sobre el arte teatral esta atrapado por otra emoción, cuyo carácter espontáneo no deja ni una duda : la del publico. No hay en éste espectáculo separación entre los actores y los espectadores. Una mirada, un dedo que apunta, y es explícitamente de todos los Cubanos de quien se trata, cualquiera que sea su edad o su historia. Y esta identificación, no se limita a una intención, se impone como una evidencia por la manera en que la emoción circula de un espacio al otro, cuando a los llantos de los actores contestan los sollozos difícilmente contenidos del público. Quizás la emoción está interpretada sobre la escena – y, de nuevo, con una técnica impresionante –, el efecto producido, él, es auténtico, y da sentido a esta interpretación. Aquí, el teatro, como reparto, más fuerte que la lectura porque es colectivo, que se produce en un mismo tiempo y en un mismo lugar, toma su sentido. Aquí, recobra su función antigua de purgación de las pasiones, cuyos efectos se perciben todavía al salir del teatro, mientras los ojos están rojos y los cuerpos encorvados.

Algunos días después de la decisión de Obama de abrogar la ley “pies secos, pies mojados”, que permitía a los Cubanos que se van de la isla de modo clandestino encontrar asilo en los Estados Unidos, el espectáculo de Celdrán resuena con una fuerza particular. Mientras que se habría podido pensar que muchos deplorarían ésta decisión, algunos dicen que al final las familias no estarán más separadas, que al final los individuos pararan de arriesgar sus vidas con la esperanza de vivir mejor en otro lugar. Y pensando que el espectáculo será presentado en Miami por primera vez en algunas semanas, ya se puede imaginar el efecto extraordinario que tendrá, frente a un publico que tomó efectivamente la decisión de irse. No habría que perder la ocasión de grabar la audiencia, porque la emoción que los espectadores ofrecen no solo es el mejor reflejo del espectáculo que se puede pensar, sino que además forma parte integrante de esta obra.

F.

Pour en savoir plus sur « 10 Millones », rendez-vous sur le site du Argos Teatro.

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