« Le Roi se meurt » de Ionesco avec Michel Bouquet à la Comédie des Champs Elysées

« Je pourrais décider de ne pas mourir ». Ionesco, dans Le Roi se meurt, confronte la volonté de puissance d’un roi omnipotent à la mort, inéluctable.  Cette célèbre pièce est revisitée par Michel Bouquet à la Comédie des Champs Elysées.

La pièce de Ionesco est difficile à mettre en scène : elle s’attaque à une problématique universelle, la mort. Or, l’auteur n’a pas déterminé d’époque ni de lieu. La scène est partagée entre un univers médiéval, autour d’un roi suzerain à la tête d’un Etat, et des éléments contemporains : les radiateurs, la machine à laver.

Ainsi, le décor et les costumes doivent s’efforcer de rendre cet hors champ et éviter de prendre un parti. D’autant plus qu’à la fin de la pièce, les portes, les fenêtres et les murs doivent « disparaître ». Difficile, donc, de se positionner.

Georges Werler tente de naviguer parmi ces contradictions apparentes, faisant surgir de réels radiateurs ou un fauteuil roulant, au milieu de costumes rougeoyants et riches. Le décor, lui, est trop imposant pour réussir à se dissoudre, mais il convoque bien l’atmosphère d’apocalypse qui règne dès l’ouverture de la pièce.

C’est à la performance remarquable et surtout partagée des acteurs que le succès de l’interprétation tient. Le texte est mis à l’honneur dans ses modulations les plus variées. Chaque comédien joue en harmonie avec les autres et montre bien sa position sur l’axe qui oppose résolution à la mort et espoir inébranlable.

La philosophie stoïcienne, qui préconise une sagesse face à la mort et un détachement des passions, se fait jour dans les paroles de Marguerite, dont la récitation monocorde s’apparente pourtant à une litanie proche du défaitisme. S’y oppose la véritable volonté de puissance du roi, au sens nietzschéen, ainsi que le solipsisme qui lui est attaché.

En effet, le roi n’est pas le seul à se mourir, comme le garde le déclame. Tout le royaume est affecté par cette mort qui intervient après plusieurs siècles de règne. Le paysage se dégrade et se rapetisse, jusqu’à se réduire à la salle du trône où tout a lieu. In fine, le roi, enfin raisonné et résolu, se retrouve seul, et avec lui tout a disparu.

Qui mieux que Michel Bouquet peut interpréter le roi de Ionesco ? Peu de monde, il est vrai. Il incarne parfaitement le personnage, mais ne fait pas pour autant d’ombre à ceux qui l’entourent. Le seul regret tient à une mise en scène plutôt classique là où l’inventivité peut trouver sa place.

 F.

Il arrive que l’on fasse un rêve. On s’y prend, on y croit on l’aime. Le matin, en ouvrant les yeux deux mondes s’entremêlent encore. Les visages de la nuit s’estompent dans la clarté. On voudrait les retenir. Ils glissent entre vos mains, la réalité brutale du jour les rejette. De quoi ai-je rêvé se dit-on ? Que se passait-il ? Qui embrassai-je ? Qui aimais-je ? qu’est-ce que je disais et que me disait-on ? On se retrouve avec le regret imprécis de toutes ces choses qui furent ou qui semblaient avoir été. On ne sait plus ce qu’il y a eut autour de soi. On ne sait plus.

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