Une soirée à Vaux le Vicomte

Au Sud-Est de Paris, au-delà même de Vincennes, au bout d’une longue allée de platanes, le Château de Vaux le Vicomte domine, conservé depuis le XVIIème siècle. Connu pour être « celui qui a inspiré Versailles », sa visite est un véritable voyage dans l’Histoire.

Arriver à 18h30 pour la visite d’un monument classé, c’est un peu tard me direz-vous. Mais l’été, à Vaux le Vicomte, le public est invité à vivre une soirée située hors du temps. Aussi, tant que la lumière illumine le lieu, il fait le tour du château de l’extérieur, profite de la vue imprenable et se balade dans le jardin à la française.

La grande différence avec Versailles pour le promeneur, c’est qu’il a le sentiment réconfortant que ce parc est à taille humaine, qu’il peut embrasser d’un seul coup d’œil la perspective, du Château à la statue d’Hercule, au loin. Il est bien surpris quand, pas à pas, il découvre de nouvelles terrasses, embellies de gracieux bassins, qui reflètent à la perfection le château.

Le personnage mythologique reste alors un horizon solaire, quelque peu inaccessible. Il faut trouver du courage et de la patience, quand, pensant arriver au bout de ses peines, il découvre le canal qui le sépare de son objectif. Dès lors, les plus courageux se lancent et le contournent, afin d’atteindre la grotte. Un dernier effort pour se retrouver aux pieds de notre statue et nous voilà récompensés d’une superbe vue, qui commence par la riche allée de platanes.

Le Nôtre, à l’origine des plans et de la construction du jardin, a réussi son effet : il aura tenu en haleine son visiteur, sur 1 500 mètres de long, sans le laisser entrevoir la distance réelle qui sépare le château de la statue. A la rigueur et l’ordre classique des premiers parterres, se mêle cette illusion baroque, qui fait tout le charme de cet espace.

Sur le chemin du retour, déjà la nuit tombe et le parc est parsemé de petites bougies, le long des allées et aux fenêtres du château. Les petits chemins sous les arbres feuillus, qui longent l’allée centrale donnent à rêver : l’on voudrait s’y croire en costumes d’époque, juchés sur des chevaux et parlant en ancien français.

La musique d’ambiance nourrit ce fantasme, malgré la préférence pour les grands poncifs de la musique classique plutôt que des airs d’époque. Les touristes n’en sont pas moins émerveillés et profitent de la douceur du soir pour rester encore dehors.

Pour nous, il est temps de voir enfin le château, qui a dominé l’espace tout au long de notre promenade. Désormais, il s’agit d’entrer dans la dimension historique du lieu. Du moins, c’est ce à quoi l’on s’attend.

Pour autant, la visite du château, avec un parcours unidirectionnel, est décevante : les chambres ou boudoirs de Fouquet, sa femme et Louis XIV sont présentés sans plus d’explications, et à moins d’avoir un guide, le visiteur se sent perdu dans sa chronologie et son Histoire.

Il faut attendre l’exposition temporaire « Splendeur et infortune de Nicolas Fouquet » pour obtenir quelques éléments. Si les cartels sont toujours aussi pauvres, des mises en scène de personnages de cire nous donnent à voir les moments clés de la destinée de Fouquet.

Surintendant des finances sous Louis XIV, il est victime des manigances de Colbert. Ce dernier a travaillé dur à la reconstitution de la fortune de Mazarin, et souhaite détourner l’attention du roi sur ses actions, qui pourraient être fortement condamnées.

Plein du désir de régner en monarque absolu et refusant toute forme de concurrence, le Roi fait arrêter Fouquet, suite à une superbe fête à Vaux le Vicomte. Malgré les nombreuses preuves mobilisées, fabriquées de toute pièce, le malheureux échappe à la condamnation à mort et termine ses 19 années de vie en prison.

Dans la mémoire collective, il devient un emblème des abus de pouvoir du Roi Soleil. En revanche, dans le domaine artistique, son nom reste lié à ceux de Jean de La Fontaine, Madame de Sévigné, Molière, Racine, Scarron, Le Brun et tant d’autres, dont il a été le mécène.

Finalement, la visite de Vaux le Vicomte se fait plus le témoin de ce second trait. Bien que le château ne vaille pas le faste de Versailles, le parc, quant à lui, respire l’intelligence, le bon goût et le raffinement. Rien de mieux pour passer une magnifique soirée, originale et instructive !

Pour plus de photos, rendez-vous sur ici.

F.

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